Volodia Opritchnik

Ancien militaire, passé à l’activisme écologique, Volodia arrose désormais les ennemis du climat à coup d’articles. Créateur de L’Usine à GES, première lettre francophone sur la politique et l’économie du réchauffement, Volodia partage son temps libre entre les dégustation de vins et de cigares. Deux productions qui ne renforcent pas l’effet de serre.

Bono s’investit dans le climat

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L’artiste irlandais participe à un fonds d’investissement dans l’atténuation et l’adaptation au changement climatique. Une activité louable qui n’est pas forcément bénévole.

Paul David Hewson est de retour ! Cet homme d’affaires avisé, philanthrope à l’occasion, est plus connu sous son nom de scène : Bono. Richissime leader du groupe U2, le chanteur-compositeur-interprète-acteur irlandais est aussi un inlassable militant de droits humains, un pourfendeur de la corruption (ce qui n’a pas empêché son association ONE de frauder le fisc sud-Africain !), un guerrier contre la pauvreté. Voilà maintenant qu’il s’investit dans la lutte contre le changement climatique. Un nouveau combat qui demande beaucoup d’argent.

5 milliards de capital

Avec quelques personnalités « Sans Difficulté Financière » (Jef Skoll, Pierre Omidyar, Richard Branson, Anand Mahindra, Mellody Hobson, David Bonderman, Jim Coulter), Bono a donc créé TPG Rise Climate Fund (RCF), un fonds d’investissement dédié au financement de ses bonnes œuvres climatiques.

Bonne nouvelle, ledit véhicule financier vient d’annoncer une levée de fonds de plus de 5 milliards de dollars. De quoi « soutenir » des entreprises engagées dans les énergies renouvelables, la production d’alimentation veggie ou la fabrication de vélos électriques.
Cet activisme économique n’a rien de répréhensible. Ce qui plus gênant, en revanche, c’est la façon dont cela fonctionne. TPG Rise Climate Fund est, en réalité, une branche de Texas Pacific Group (TPG, donc), imposante société ayant plus de 100 milliards de dollars d’actifs en gestion.

Mutualiser les investissements, privatiser les bénéfices

L’activité de ces gestionnaires d’actifs est de prendre le contrôle de sociétés avant de revendre les actions au bout de quelques années. Bono (dont la fortune personnelle est évaluée à 700 M$) et ses petits camarades vont donc empocher une partie des dividendes annuels et du produit de la vente des actions des sociétés « soutenues ».
Comme toutes les sociétés de gestion qui se respectent, TPG ne paie pas les actions qu’elle achète. C’est une structure ad hoc qui emprunte sur les marchés le montant des actions avant de payer l’addition pour le compte de la société de gestion. Avec les dividendes versées, TPG et ses filiales remboursent ladite structure et fait un bénéfice en passant.

Pro-Bono?

Evidemment, les sociétés de gestion ont tout intérêt à ce que les profits dégagés par leurs acquisitions soient les plus importants possible. Ils privilégieront, pour ce faire, les entreprises bénéficiant d’une rente (un propriétaire d’autoroute, par exemple) ou dont on pourra pressurer les salariés, comme c’est souvent le cas dans les start-up prometteuses.
Bref, Bono et ses amis vont, peut-être, contribuer (un chouia) à décarboner notre économie. Mais ils en tireront à coup sûr un gros profit. Quant à la pérennité des sociétés dans lesquelles ils viennent d’investir, c’est une autre histoire.

 

Le mystère de la concorde martienne.

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Alors que le français Thomas Pesquet nous observe depuis trois mois à bord de l’ISS, Zeweed se penche sur une cosmique question: et si les Martiens avaient téléporté la weed pour lubrifier les rouages du dialogue entre les civilisations ?

Une fois n’est pas coutume : les Français sont contents. Ils n’ont pas vaincu la Covid-19 ni gagné l’Euro mais l’un des leurs flotte dans l’espace. Et c’est une source de fierté. Objectif lune ? Pas vraiment.
Propulsé par sa fusée Falcon 9, Thomas Pasquet n’a fait qu’un saut de puce. Avec ses trois collègues américains et japonais, le pilote normand a abordé la station spatiale internationale (ISS), quelques heures à peine après son décollage d’une lagune de Floride. Ladite station se balade à 400 km au-dessus de nos têtes. 400 km … autant dire rien au regard de l’immensité du vide sidéral.

Objectif mars

Durant les six prochains mois de son deuxième séjour spatial, le cosmonaute réalisera une douzaine d’expériences à vocation scientifique : étudier objets et liquides sans les toucher, décrypter le sommeil lors des missions spatiales habitées de longue durée. Dans la tête des responsables du centre national d’études spatiales, tout ceci sert un objectif majeur : préparer les vols habités vers mars.
De longue date, la planète rouge fascine les terriens. Voilà un demi siècle que les Européens et les Américains lui décochent des volées régulières de satellites, robots, rovers et autres drones héliportés. Quel lien nous unit donc à cette sœur-terre, où la vie semble s’être asséchée il y a des milliards d’années ?

Plus forte que la violence

La mythologie romaine voyait en Mars un dieu de la guerre tellement belliqueux qu’il valait mieux le garder éloigné du centre de l’agora. Mais le pendant romain d’Ares est aussi le dieu des sols et du cycle phénologique. Selon certains, il serait à ce titre l’introducteur du cannabis dans les mondes romain, scythe, arabe. Autant de conquérants qui surent s’attirer les bonnes grâces des peuples qu’ils soumettaient. Quel était donc leur secret ? Le fil du glaive n’explique pas tout. Malgré la barrière de la langue, des religions et des conditions sociales, maîtres et esclaves se comprenaient. S’appréciaient parfois.
Imaginable qu’une civilisation martienne nous ai, par l’entreprise d’une divinité ambassadrice, légué son secret de la concorde universelle ? La réponse figure dans Rencontre nocturne. Dans ce onzième chapitre de ses Chroniques martiennes, Ray Bradbury conte la rencontre d’un terrien et d’un martien. Tomás Gomez et Muhe Ca se comprennent au premier regard grâce à une télépathie, cannabique. Forcément.

Dialogue à travers les siècles

Ils dialoguent, s’entendent, sans pouvoir se toucher, ni voir la même chose au même moment. Ils sont des fantômes l’un pour l’autre, mais se parlent. Grâce au miracle cannabique, deux être finalement distant de plusieurs siècles nouent un dialogue fructueux et amical.
Le miracle se poursuit. Aujourd’hui, en France, des partisans du libre fumet s’accordent avec des politiciens conservateurs pour libéraliser l’usage du cannabis dans l’un des pays les plus répressifs qui soit. La concorde cannabique a, une fois encore, fait la preuve de son efficacité à faire se comprendre des êtres venus d’autres dimensions.

La neutralité carbone: un projet de Société

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L’agence internationale de l’énergie vient d’esquisser la feuille de route de la décarbonation de notre société. Rien ne dit que nous serons capables de la suivre dans les temps impartis.

Ce sera l’expression favorite des participants au prochain sommet climatique onusien (Cop 26) : la « neutralité carbone ». Introduit dans l’accord de Paris, ce concept stipule, qu’après avoir fortement réduit leurs émissions de gaz à effet de serre (Ges), les pays signataires de l’accord de 2015 stockent leurs rejets de carbone incompressibles. Par exemple en plantant des forêts, véritables éponges à CO2.

Ampleur de l’effort

Durant cette fameuse Cop 26, une bonne centaine de gouvernements devront décrire le chemin qui les mènera à ce nirvana climatique. L’agence internationale de l’énergie (AIE) leur mâche le travail. Travaillant pour les pays de l’OCDE, ce club d’experts des politiques énergétiques et climatiques a publié, ce 18 mai, une feuille de route de la neutralité carbone. En clair : quelle est l’ampleur des efforts que chaque secteur d’activité devra accomplir d’ici à 2050 pour se décarboner.

Ne faisons pas durer le suspens : il y a un boulot de dingue ! Pour le moment, les trois quarts de l’énergie que nous consommons sont d’origine fossile. En moins d’une génération, nous devons nous guérir de cette addiction au pétrole, au gaz et au charbon. Possible, mais pas gagné.

5 fois moins de pétrole

L’AIE ne fait pas dans la dentelle. L’agence basée à Paris propose ni plus ni moins de stopper les investissements dans les énergies fossiles. Dès maintenant ! En 2050, les compagnies pétrolières ne devront pas extraire plus d’une vingtaine de millions de barils de brut par jour : cinq fois moins qu’aujourd’hui.

Parce qu’en 30 ans, le PIB mondial devrait croître de 40% et la population progresser d’un tiers, il faudra produire plus d’énergie. Et surtout beaucoup plus d’électricité, seule à même de décarboner de nombreux usages, à commencer par les transports.

À ce propos, les voitures électriques devront représenter 60% des ventes de véhicules neufs, dès 2030, contre 5% en 2020. La production de véhicules à moteur thermique devra être interdite à partir de 2040, estime l’AIE.

Quadrupler les investissements

Décarboner la production d’électricité nécessitera des efforts sans précédents. Chaque année, les électriciens du monde entier devront mettre en service 630 000 MW de centrales solaires et 390 000 MW de parcs éoliens. Ces puissances sont quatre fois supérieures à celles inaugurées durant l’année 2020, rappelle l’AIE. Créer toujours plus de centrales et de points de soutirage (à l’instar des bornes de recharges des voitures électriques) impose de développer les réseaux de transport et de distribution d’électricité. L’AIE propose de quadrupler les investissements dans ces deux activités, souvent délaissées,

Destruction d’emplois

Les rapporteurs reconnaissent sans fard que tous les usages ne pourront se passer d’énergies fossiles. Par exemple : les centrales à charbon récemment mises à feu. D’où l’importance de les équiper de systèmes de captage de CO2, couplés à des installations de stockage géologique du carbone. Vedette énergétique du moment, l’hydrogène aura son rôle à jouer pour décarboner certaines activités très carboniques, à l’instar de la production d’acier ou de carburants.

La transformation à accomplir est d’ampleur. Rien ne dit pourtant que nous serons capables de la mener à bien. Réduire la consommation d’énergies fossiles détruira 5 millions d’emplois dans les industries pétrolières et charbonnières. Et réduira drastiquement les revenus des pays producteurs. De quoi nourrir la contestation et la frilosité des politiques.

Are we ready ?

L’AIE souligne aussi l’importance de réduire le gaspillage d’énergie. En dopant les rendements des moteurs, en minorant l’éclairage urbain, en diminuant nos besoins en mobilité. En 2030, soulignent les experts, nous devons améliorer de 4% par an notre efficacité énergétique : trois fois mieux que la moyenne observée ces 20 dernières années. Il faudra pour ce faire, déployer des technologies qui n’existent pas encore ou qui sont en cours d’essais. Seront-elles prêtes à temps ?

Un fort développement des énergies renouvelables et des systèmes de stockage d’électricité va plus que quadrupler, en 30 ans, la consommation de minerais : cuivre, lithium, cobalt, terres rares. Des productions rarement très écologiques. Quelle sera, aussi, l’évolution de nos comportements ? Voyages, alimentation, performance énergétique de notre logement : 55% des émissions futures seront le fruit de nos choix de consommation.

Selon les choix que nous ferons, la route de la neutralité carbone sera plus ou moins longue. Are we really ready to change ? Seulement, sans doute, si l’on nous vend la transition climatique comme un projet de société. Joe Biden mis à part, aucun politique n’est pour le moment capable de le faire.

Sur la route de la voiture électrique verte

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Deux start-up nord-américaines proposent de  recycler les matériaux précieux contenus dans les anciennes batteries. Une très bonne initiative face à cet enjeu écologique majeur. 

Si vous ne connaissez pas encore Redwood Materials et Li-Cycle, cela ne devrait pas tarder. Grâce à ces deux start-up, la voiture électrique amorce un grand bond écologique. La compagnie made in Nevada et sa concurrente ontarienne se positionnent sur le marché embryonnaire du recyclage des batteries de véhicules électrique. Et il y a du travail!

Métaux précieux

Dans le monde, plus de 95 % des batteries sur 4 roues finissent à la décharge, dans des incinérateurs ou dans la nature. Or, même si elles sont à plat, elles restent bourrées de matériaux précieux. La moitié de la valeur de la très performante NMC 811 de LG Chemical est le fait du nickel, lithium, cobalt et du manganèse que contiennent ces batteries très performantes.

Recycler ces matières premières, c’est réduire l’exploitation des gisements miniers. Ce qui allège le bilan environnemental et climatique des batteries et donc des voitures électriques ! Important, car les mines sont souvent situées dans des pays où l’on se moque de l’environnement et des hommes (république démocratique du Congo, Chine).

De plus, les matériaux font du chemin avant d’être placé sous le capot. Extrait au Congo, le cobalt est le plus souvent raffiné en Finlande, avant d’être transformé, en Chine. Les modules prêts à l’emploi sont envoyés ensuite dans les Gigafactories européennes ou américaines pour y être intégrés aux batteries.

Gisements domestiques

Après avoir levé plus de 1,3 milliard de dollars, Redwood Materials et Li-Cycle vont construire leurs usines de recyclage et collecter des millions de batteries de tous types : auto, vélo, ordinateurs, téléphone. La matière première secondaire ne manque pas : rien qu’aux Etats-Unis, 1 milliard de batteries usagées dormiraient dans les tiroirs et les garages. Les deux sociétés ont, en outre, conclu des partenariats avec des grands distributeurs (Amazon), des fabricants de véhicules électriques (Proterra, Specialized, Tesla) et des producteurs de batteries (Panasonic) pour faciliter leur approvisionnement et s’ouvrir de nouveaux marchés.

Nouvelle, l’activité suscite de grands espoirs chez les industriels et les investisseurs. D’ici à 2030, la demande annuelle de batteries pour véhicules électriques devrait décupler, estime Bloomberg New Energy Finance. Et il n’est pas sûr que les mines en activité puissent satisfaire pareille augmentation de la demande. Flairant un marché prometteur, le Wall Street Journal et Dow Jones publient, depuis le 1er août, les mercuriales de prix des métaux entrant dans la composition des batteries. Faites vos jeux.

 

Greta Thunberg : ange ou démon de la climatosphère ?

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Activiste surdouée, la créatrice des grèves de l’école pour le climat a contribué à mobiliser les foules contre le réchauffement. Mais qui est-elle vraiment ?

Le monde l’a découvert toute de jaune vêtue. A la fin de l’été 2018, chaque vendredi, les parlementaires suédois croisent à l’entrée du Riksdag une jeune fille engoncée dans un ciré de marin. A ses côtés, une pancarte explique que sa porteuse fait la grève de l’école pour le climat. Ecrit en lettres de bâton noires, le slogan « Skolstrejk för klimatet » et le Hashtag #FridaysForFuture ne tardent pas à faire le tour des réseaux sociaux avant d’être repris dans le monde entier par des millions de manifestants.

Manif à l’ONU

En décembre de la même année,  Greta Thunberg et quelques dizaines de lycéens manifestent dans les couloirs du centre des congrès de Katowice (Pologne) ou se tient le sommet sur le climat de l’ONU. Ils y font une promesse : celle de ne pas retourner à l’école  tant que les adultes ne  tenterons pas de vraiment lutter contre le réchauffement climatique. L’idole des jeunes tiendra parole: à 16 ans, la Suédoise prend une année sabbatique. Elle en profite pour animer son réseau international Fridays For Future et tancer les grands, tellement inactifs. En septembre, lors d’une conférence sur le climat à New York, elle leur lance son fameux : « comment osez-vous ? » La rédaction du magazine Time la bombarde personnalité de l’année.

Le climat dans le sang

Ce n’est pas exagéré de dire que Greta Thunberg a le climat dans la peau. L’un de ses aïeux n’est autre que Svant Arrhenius. Couronné par le Nobel de chimie de 1903, l’auteur de la loi qui porte son nom est aussi le premier à avoir postulé, en 1896, qu’un doublement de la concentration de CO2 dans l’atmosphère accroitrait la température moyenne globale de 5 °C. Une estimation assez proche de celle produite par le Giec, près d’un siècle plus tard !

Dans sa production soutenue de tweets (une moyenne de 9 par jour !), l’adolescente parle de beaucoup de choses : droits de l’homme, violences au Moyen-Orient, de commerce international, la pandémie de Covid-19. Mais le gros, le très gros de sa prose reste consacré aux changements climatiques, à ses causes, à ses effets. Et aux moyens de le stabiliser. Dans ses discours, ses vidéos, dans les interviews qu’elle accorde aux médias du monde entier, dans la série documentaire que lui consacre la BBC, elle ne dit qu’une chose : « ne m’écoutez pas, écoutez les scientifiques ».

Une vraie tronche

Maîtrisant mieux que la plupart des adultes les principes de la « science du climat », celle qui est née « à 375 ppm » s’appuie sur la littérature scientifique pour convaincre. « Je suis soufflé par la justesse de ses propos, appuyés sur une sérieuse connaissance des mécanismes à l’œuvre et des causes de la crise climatique », estime l’ancien vice-président du GIEC, Jean-Pascal van Ypersele (université de Louvain). « Elle a profondément compris ce que ça implique en termes de transformations si on veut être cohérents avec l’Accord de Paris », abonde Valérie Masson-Delmotte, paléoclimatologue (LSCE) et co-présidente du groupe 1 du Giec.

Une fine équipe

Icône d’une génération d’activistes, l’ancienne élève de l’école française de Stockholm n’est pas seule. Ses parents se sont mis au service de sa cause. Sa mère, la cantatrice Malena Ernman, a mis sa carrière entre parenthèses pour soutenir sa fille. Ancien acteur, son père Svante, joue le manager dans tous ses déplacements. Non sans succès. La famille Thunberg a déjà publié deux livres, dont les droits d’auteur, assure l’éditeur, seront reversés à des associations de protection de l’environnement et des animaux. Lors de ses déplacements à l’étranger, les ambassades de Suède surveillent la fine équipe. « A Paris, nous craignions vraiment pour sa sécurité, nous l’avons hébergé à l’ambassade », confirme une diplomate suédoise.

Vieux mâles blancs

C’est peu de dire que le succès planétaire de Greta Thunberg énerve. A droite comme à gauche, on l’accuse d’être la marionnette de milliardaires américains ou d’industriels de l’éolien ou de communicants sans scrupule. Sans preuve. Sans en chercher, certains vieux mâles blancs font tout de même commerce de leur haine de la militante du climat. L’essayiste Pascal Bruckner est de ceux-là. Tout comme Laurent Alexandre. « Je suis consterné que ses parents l’aient autorisée à quitter l’école, ce qui va aggraver ses troubles obsessionnels ! », déclare au Point l’urologue à tendance eugéniste.

Redoutable souffrance

La cuirasse de la jeune suédoise n’est effectivement pas sans défaut. Greta Thunberg est atteinte du syndrome d’Asperger. Une forme d’autisme dont Laurent Alexandre fustige la mise en valeur. « Mettre en avant des enfants présentant une souffrance est répugnant, mais d’une efficacité redoutable. » Le fondateur de Doctissimo ne croit pas si bien dire.

Dans une confession à la RTS suisse, Greta Thunberg est longuement revenue sur ses troubles. « Au début ce n’était pas un point fort. C’était quelque chose qui rendait ma vie beaucoup plus difficile. Mais ensuite, avec les bonnes circonstances, j’ai pu inverser la situation. Et au lieu que ce soit une faiblesse, j’en ai fait une force. » Obsessionnelle du Warming, elle mis son « super pouvoir », comme elle l’appelle, au service de son engagement. « Je pense hors du cadre habituel, souligne-t-elle. Et c’est nécessaire pour voir ce qui se passe avec notre système actuel. Sans cela, je n’aurais pas eu le temps ni l’énergie pour passer des milliers d’heures à lire sur ce sujet. »

Agaçante, Greta Thunberg ? Sans doute, pour celles et ceux qui ne supportent pas les vérités qui dérangent.

Louie Gohmert, l’homme qui voulait (vraiment) décrocher la lune

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Peu connu, ce député texan propose de désorbiter la lune pour rafraîchir le réchauffement. Cette proposition loufoque s’inscrit dans un contexte de retour en grâce des projets improbables de géo-ingénierie.

Député du 1er district du Texas depuis 2005, Louie Gohmert a tout pour déplaire. Républicain tendance Trump, cet ancien juriste militaire est, naturellement, opposé à l’avortement, au renforcement des droits des LGBT, à la répression d’actes haineux, au mouvement Black Lives Matter.

Farouche défenseur du port d’arme, ce fils d’architecte propose d’autoriser les professeurs à venir en classe armés, pour réduire les risques de tueries de masse dans les écoles. Elu d’une région pétrolifère, Louie Gohmert se range du côté de l’industrie pétrolière. Un choix écologique. Après tout, claironne-t-il, les pipelines favorisent l’activité sexuelle des … caribous.

Texan toxique

Provocateur-né, l’ancien capitaine critique l’encyclique Laudato si’. Of course : le texte papal s’appui sur de « la fausse science ». « Le pape a été persuadé que le changement climatique est un phénomène qui affecte considérablement la planète », affirme celui qui, comme Galilée l’a fait avant lui, « questionne » le dogme scientifique.

Ce nouveau texan toxique semble pourtant avoir évolué ces derniers temps. S’il en minore toujours l’origine anthropique, le député républicain ne conteste plus l’existence du changement climatique. Il se demande même comment en contrebalancer les effets.

Modifier l’orbite de la lune

En juin dernier, au cours de l’audition d’une responsable du service fédéral des forêts, le parlementaire s’est interrogé sur la meilleure façon de refroidir le réchauffement. Une idée a surgi : « modifier la course de la lune autour de la terre ». La proposition a laissé sans voix la fonctionnaire. D’apparence anodine, cette remarque prend tout son sens dans le contexte actuel.

Nombre de multinationales américaines entreprennent d’alléger leur impact climatique. De Microsoft à BlackRock, en passant par Wallmart ou Apple, ils visent (presque) tous la neutralité carbone.

Aspirer le CO2

Technophiles, les patrons US en pincent pour les solutions les plus folles et les moins chères. United Airlines vient de conclure un accord inédit avec Carbon Engineering (CE). Cette compagnie canadienne construira une installation capable de capter autant de gaz carbonique dans l’air que rejetteront les avions de la plus grande compagnie aérienne du monde. Si le bilan carbone du transporteur s’en trouvera équilibré, le climat n’en sera pas quitte. Car, le gaz carbonique aspiré par  CE sera revendu à une compagnie pétrolière pour booster la production de ses puits de pétrole et de gaz.

A mesure que les effets du réchauffement se sont sentir, la tentation de les combattre en modifiant les grands cycles bio-géo-chimiques s’accroît. En mars dernier, l’académie des sciences US recommandait de financer la recherche pour renvoyer dans l’espace une partie du rayonnement solaire. Depuis de nombreuses années, des scientifiques de Harvard peaufinent un dispositif de brumisation de sulfates à haute altitude. Là encore pour refroidir le réchauffement.

Tentation dangereuse

Popularisée par la superproduction Geostorm, la géo-ingénierie traîne une sale réputation. Si elle a le potentiel (sur le papier) de rafraîchir le globe, elle n’a pas encore prouvé sa capacité à rafraîchir également toutes les régions de la planète. Une Inde refroidie à côté d’un Pakistan surchauffé : on imagine le résultat d’une climatisation inéquitable.

Refroidir le réchauffement, sans réduire les émissions de CO2, n’aura, de plus, aucun effet sur l’acidification en cours des océans : un phénomène potentiellement dévastateur pour la biodiversité marine. La géo-ingénierie pose aussi de redoutables questions éthiques : qui contrôle le système, quelle en est l’économie, que faire si un pays ne peut plus payer, quel est le régulateur ?

Les délires de Louie Gohmert ont ceci de bon : ils replacent dans le débat public un sujet que la société est loin d’avoir tranché.

Fit for 55: l’ambitieux programme écolo de l’Union Européenne

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Le 14 juillet, la Commission européenne dévoile son programme climatique. Il vise à nous faire réduire de moitié nos émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2030. Trop gourmand?

Faut-il y voir l’annonce d’une révolution écologique en Europe? Toujours est-il que c’est le 14 juillet que le nouveau paquet climat 2030 de la Commission européenne, sobrement baptisé « fit for 55 », sera présenté.

Un peu absconse, cette appellation annonce pourtant un véritable bouleversement. Qu’il s’agisse de nos modes de production, de transport, de la structure de nos échanges commerciaux ou de notre relation à l’énergie . En réécrivant une douzaine de directives, règlements et normes, la Commission européenne vise à réduire de 55 % les émissions de gaz à effet de serre (GES) des 27 pays de l’Union européenne, entre 1990 et 2030.

Marché du carbone

Jusqu’à présent, l’Europe prévoyait de réduire de 40 % ses émissions durant cette période. Sachant que nous avons grosso modo baissé de 20 % notre contribution au renforcement de l’effet de serre depuis 1990, nous allons devoir cravacher d’ici la fin de la décennie. Dit autrement, nous allons devoir réduire d’un tiers nos émissions de GES en 8 ans !

Pour nous inciter à changer de mode de vie, Bruxelles va frapper fort. D’abord, en instaurant une taxe carbone sur les importations en provenance de pays qui n’appliquent pas l’accord de Paris sur le climat. Important, si l’on considère que la moitié de l’empreinte carbone européenne est imputable aux produits et services qu’elle importe. L’industrie ne sera pas oubliée. Les services de la présidente Ursula von der Leyen prévoient de durcir les règles du marché communautaire de quotas d’émissions de GES. Ce cadre légal (ETS) obligera par exemple les entreprises du transport aérien et maritime à réduire leurs contribution au réchauffement.

Les 11 000 sites industriels qui sont d’ores et déjà assujettis à cet ETS recevront de moins en moins de quotas d’émissions. De quoi les inciter à accélérer la décarbonation de leurs procédés de fabrication.

Plus de moteur thermique

Afin d’orienter les constructeurs d’automobiles vers l’électrique, la vente de voitures neuves à moteur thermique devrait être interdite dès 2035. Collectivement, nous devrons sensiblement accroître nos consommations d’énergies renouvelables, sous forme d’électricité, de combustible et de carburants.
A cet égard, la fiscalité de l’énergie sera revue. Ce favorisera la réduction du coût d’utilisation des véhicules électriques et le prix du kérosène décarboné pour l’aviation.
Le BTP devrait profiter pleinement du paquet « fit for 55 ». La nouvelle mouture de la directive sur l’efficacité énergétique devrait fixer des objectifs ambitieux et contraignants de rénovation de bâtiments publics et privés.

Cohérence des politiques

Hors les villes, la Commission prévoit d’engager une ambitieuse stratégie forestière. Il s’agira de planter des millions d’arbres, pour reconstituer des massifs dégradés, mais aussi pour verdir (et rafraîchir) les environs des villes. Ce programme d’afforestation accroîtra aussi les capacités de stockage de carbone de la forêt européenne et contribuera à instiller un peu de biodiversité dans le paysage urbain.

Avec la publication de ce paquet législatif, la Commission ouvre toute une série de négociations sectorielles (sur la forêt, l’automobile, la fiscalité de l’énergie, le commerce extérieur, l’ETS, etc.) qui devraient durer une paire d’années. Si tout va bien. Parmi  les écueils qu’il faudra éviter : l’incohérence des politiques. L’Europe devra veiller à ce que sa future politique agricole commune (PAC) réduise enfin les émissions de méthane et de protoxyde d’azote de l’agriculture européenne. Ce qu’elle a bien été incapable de faire jusqu’à présent, malgré l’investissement de 100 milliards d’euros à cette fin, entre 2014 et 2020.

La weed extraterrestre, si on en parlait ?

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En attendant la mise en culture de mars, de nombreux indices laissent supposer l’existence d’herbe dans l’espace. Embarquement immédiat pour un voyage inédit.

Voilà un mois que Perseverance est en rodage. Le rover robotisé américain fait ses premières tours de roues. Il devrait bientôt partir à la chasse de traces de vie : but de sa mission. La Nasa ne le confirmera jamais, mais son objectif ultime est de rendre Mars habitable. Dans les années 1970, l’un de ses plus brillants chercheurs, Carl Sagan, avait proposé de « terraformer » la planète rouge.

Coup de chance, plusieurs méthodes sont à notre disposition. Les scientifiques proposent de précipiter sur mars des gaz riches en ammoniac. En contaminant la fine atmosphère martienne, l’ammoniac apporterait de l’oxygène à l’atmosphère et réchaufferait le climat. Important, si l’on se souvient que la température moyenne qui règne à la surface de la quatrième planète du système solaire est de -63°C, contre +14°C sur terre. Cette solution « collisionnaire » pose tout de même quelques questions éthiques.

Merveilles chimiques

Faute de corps célestes à sacrifier, on peut injecter à la surface de Mars des gaz de synthèse. La liste est longue : PFC, HFC ou SF6 : leur pouvoir de réchauffement est plusieurs milliers de fois supérieur à celui du CO2. Efficace. Saturer l’atmosphère martienne avec ces merveilles de la chimie terrestre recréerait une atmosphère respirable et monterait les températures à des niveaux acceptables pour l’espèce humaine. A condition d’avoir beaucoup, mais vraiment beaucoup, de fusées sous la main.

La solution la plus « sioux » reste la dissémination de cyanobactéries à la surface. Des chercheurs de l’université de Brême (Allemagne) ont montré que ces micro-organismes terrestres se contenteraient du sol et de l’atmosphère martiens tels qu’ils existent. Au bout de quelques siècles, ces cyanophycées produiraient une atmosphère riche en oxygène et un substrat cultivable. De quoi favoriser la colonisation.

Les preuves

Le problème de l’habitabilité étant résolu, posons-nous la seule question qui vaille : Mars offre-t-elle un terrain favorable à la culture de la weed ? Cela semble évident. Le sol est riche, gorgé d’eau (dans les roches), bientôt fertile. La température y sera progressivement compatible avec les besoins du cannabis. Que demander de plus ? Une preuve.

La littérature en fournit pléthore. Dans les Chroniques martiennes, Ylla K a, à l’évidence, consommé de l’herbe avant de s’endormir. Pour preuve : elle rêve de beaux cosmonautes. Comme si l’on pouvait tomber amoureuse de militaires aux tempes rasées, vêtus de pyjamas moulants.

Quelques chapitres plus loin Ray Bradbury nous conte l’histoire de Monsieur Xxx. Télépathe et sympathique, le psychiatre en chef des Martiens confond fusée et sucette : une indication, s’il en était besoin, de ses très avouables penchants cannabiques.

Musique extraterrestre

La weed n’a pas seulement colonisé la Terre et Mars. A en croire Arthur C. Clarke, on en trouve d’indiscutables traces sur la lune. Dans 2001, l’odyssée de l’espace, une escouade de cosmonautes se met à creuser frénétiquement la surface de la lune jusqu’à mettre à jour un monolithe noir de 11 pieds de haut, et 11/4 sur 5 pieds de section transversale diffusant une assourdissante musique interstellaire. Personne ne l’a jamais revu. Jusqu’à ce jour de mai 1969. En survolant la face cachée de l’astre de la nuit, les astronautes d’Appolo 10 ont clairement entendu la même musique extraterrestre que les occupants de la base lunaire Clavius. La Nasa gardera l’information secrète jusqu’en … 2016.

Dans l’espace, les effets de l’herbe sont aussi puissants que ceux de l’ergot de seigle. Ce n’est pas David Bowman qui me contredira. En route pour Jupiter, le commandant de Discovery One n’a pas cessé, nous raconte toujours Arthur C. Clarke, d’avoir des visions psychédéliques. Ce qui laisse supposer l’existence d’un nuage psychotrope et invisible entre la lune et la plus grosse planète du système solaire.

Vous n’êtes pas obligés de me croire. Notre galaxie, la Voie lactée, abrite plus d’un milliard d’étoiles comparables à notre soleil. Avec leur cortège de planètes, plus ou moins capables d’abriter la vie. Libre à vous d’en tester le potentiel cannabique. Mais souvenez-vous d’une chose : dans l’espace personne ne vous verra fumer.

Le chanvre s’apprête à porter l’industrie textile vers le développement durable

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Le 100% coton vit-il ses derniers jours? Si la fibre star du prêt-à-porter reste une matière incontournable sont hégémonie sur les cintres est remise en question. En cause, sont impact environnemental. Alternative à la fibre de cellulose blanche, le chanvre est de plus en plus tendance dans les rayonnages.

On le sait peu, mais l’industrie mondiale de la mode est l’une des pires destructrices de l’environnement que l’on connaisse. Mondialisation, multiplication du nombre de collection et production à la chaîne ont fait décoller la production textile, propulsé les prix vers le bas, sans qu’aucune régulation environnementale ne soit imposée. Le résultat ne pouvait qu’être désastreux.

Une industrie plus polluante que celles des transport aériens et maritime réunis.

La Fondation Ellen MacArthur estime que l’industrie textile rejette plus de gaz à effet de serre (GES) que les transports aériens et maritimes réunis. Dans les champs, la production de coton est connue pour son appétit en eau (la quasi disparition de la mer d’Aral en témoigne) et sa consommation de pesticides. Les procédés utilisés pour vieillir artificiellement certaines toiles sont toxiques pour l’eau et les bronches des salariés des usines. Last but not least : la plupart des tissus industriels sont truffés de matières synthétiques (élasthanne, polyester, acryliques) dont la dégradation, lors du lavage en machine, contribue à la pollution des océans par les déchets microplastiques.

Des fibres en béton

Devons-nous arrêter nos machines à laver ? Repriser nos vêtements en jeans jusqu’à la trame ? Il y a une autre option : le chanvre. Cultivé depuis les premiers temps de l’agriculture, Cannabis sativa ressemble comme deux gouttes de pétrole à Cannabis indica. Contrairement à son cousin, le chènevis est extrêmement pauvre en THC (inférieur à 0,2 % en France et 0,3 % au Canada !). Solidement bâti en fibres, le chanvre servait à produire quantités industrielles de cordages, de voiles, de vêtements, de papier (pour imprimer les billets de banque notamment). Hélas, coton et matières plastiques sont venus à bout de ce matériau noble. Occupant 300 000 hectares au XIXe siècle, les plantations françaises ont pratiquement disparu à la moitié du siècle suivant.

Série limitée

À l’heure du réchauffement climatique, ce sont les industriels de l’isolation qui lui redonnent vie. Ses fibres servent désormais à produire de la laine de chanvre, l’un des isolants les plus efficaces, les plus sains et les plus écologiques qui soient. Cette renaissance intéresse aussi les industriels du textile. En 2019, Levi’s a fait un galop d’essai en commercialisant une série limitée de vêtements contenant un tiers de chanvre et deux tiers de coton. Amusant, si l’on se souvient que les premiers pantalons produit par le géant du jeans, au temps de la ruée vers l’or, était en … chanvre.

Objectif : développement durable

A Floirac, dans la Lozère (sud de la France), les Ateliers Tuffery (créateurs du jeans français !) proposent depuis quelques années toute une gamme de prêt-à-porter en chanvre. Les fibres sont produites par VirgoCoop. Originalité de cette coopérative de Cahors : elle achève la mise au point d’une machine qui permettra aux agriculteurs de produire, eux-mêmes, leurs fibres de chanvre, gage d’une meilleure valeur ajoutée. Comme quoi, on peut conjuguer consommation responsable, relocalisation de l’industrie et agriculture raisonnable. En se mettant du chanvre sur les fesses, on contribue au développement durable !

 

Christopher Stone, l’avocat des arbres

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Créateur de la personnalité juridique de la nature, le juriste californien a rejoint les terrains de chasse de ses ancêtres.

En 2017, la Nouvelle-Zélande et l’Inde ont fait avancer le droit de l’environnement comme jamais. Cette année-là, les juristes des deux pays ont accordé la personnalité juridique à trois fleuves : le Whanganui (Nouvelle-Zélande), le Gange et la Yamuna (Inde).

Cette révolution permet désormais à des citoyens ou des associations d’ester en justice au nom d’une de ces trois rivières sacrées (pour les Maoris et les Hindouistes) s’ils les estiment menacées. Rien n’interdit non plus de conclure un contrat entre une entité humaine et le fleuve. Utile si l’on veut, par exemple, préserver un débit minimum en période de sécheresse.

La protection juridique de la nature

Révolutionnaire, cette mesure doit beaucoup à un homme depuis longtemps tombé dans l’oubli et qui vient de succomber à la maladie d’Alzheimer. Indéboulonnable professeur de droit à l’université de Californie du sud, Christopher Stone a ouvert la voie à la protection juridique de la nature. En 1972, il publie un volumineux papier (50 pages) appelant à octroyer des « droits légaux aux forêts, océans, rivières et tout ce que l’on appelle les “objets naturels“ présents dans l’environnement », écrit-il en introduction de son papier.

Totalement étranger aux questions environnementales, Christopher Stone s’est intéressé à la question à la suite d’un retentissant procès ayant opposé, à la fin des années 1960, la Walt Disney Company au Sierra Club. L’ONG environnementaliste voulait empêcher le groupe de Mickey de raser une forêt californienne pour y construire une station de ski susceptible d’accueillir 2 millions de clients par an. Le différend sera finalement tranché par la cour suprême des états-Unis.

Les arbres doivent-ils plaider ?

Dans un arrêt célèbre, rendu le 19 avril 1972, la plus haute juridiction américaine déboute finalement les écologistes. Ces derniers, indiquent les magistrats, n’ont aucune raison valable d’intenter une action judiciaire, ne subissant aucun préjudice direct. Le juriste californien voit dans cette affaire hors normes un formidable sujet d’étude. Il en tire son article, développé plus tard dans un livre, traduit en français sous le titre : « Les arbres doivent-ils plaider ? ». Sans surprise, sa réponse est évidemment positive.

Charte constitutionnelle

Bien sûr, concède-t-il, les chênes ou les séquoias ne peuvent, directement, ester en justice. Mais c’est aussi le cas de certaines personnes humaines, telles les handicapés mentaux. L’obstacle peut être aisément contourné, poursuit-il, en confiant cette tâche à un tuteur, à l’instar de ce qui se pratique souvent avec les enfants. Cette proposition lui vaudra renommée et sarcasmes parmi ses pairs.

La personnalité juridique de la nature est-elle, pour autant, l’avenir du droit de l’environnement ? Tout dépend, sans doute, des pays et des thématiques. Certes, le principe n’est pas entré dans le code de l’environnement français. Pour autant, la Charte constitutionnelle de l’environnement, adoptée en 2004, rappelle que « l’avenir et l’existence même de l’humanité sont indissociables de son milieu naturel. » Cela ne classe pas encore les ormes au rang de justiciables. Mais ce principe devrait interdire de facto toute destruction du milieu naturel.

Dans les mers, des scientifiques ont publié, en 2010, la Déclaration des droits des cétacés. Encore peu connu, ce texte (qui n’est pas contraignant) stipule que baleines, dauphins et cachalots ont le droit de vivre libre dans leur environnement naturel. Des principes encore trop souvent bafoués. Mais que fait la justice ?

Should Trees have standing? L’ouvrage de référence de l’avocat vert.
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