Louie Gohmert, l’homme qui voulait (vraiment) décrocher la lune

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Peu connu, ce député texan propose de désorbiter la lune pour rafraîchir le réchauffement. Cette proposition loufoque s’inscrit dans un contexte de retour en grâce des projets improbables de géo-ingénierie.

Député du 1er district du Texas depuis 2005, Louie Gohmert a tout pour déplaire. Républicain tendance Trump, cet ancien juriste militaire est, naturellement, opposé à l’avortement, au renforcement des droits des LGBT, à la répression d’actes haineux, au mouvement Black Lives Matter.

Farouche défenseur du port d’arme, ce fils d’architecte propose d’autoriser les professeurs à venir en classe armés, pour réduire les risques de tueries de masse dans les écoles. Elu d’une région pétrolifère, Louie Gohmert se range du côté de l’industrie pétrolière. Un choix écologique. Après tout, claironne-t-il, les pipelines favorisent l’activité sexuelle des … caribous.

Texan toxique

Provocateur-né, l’ancien capitaine critique l’encyclique Laudato si’. Of course : le texte papal s’appui sur de « la fausse science ». « Le pape a été persuadé que le changement climatique est un phénomène qui affecte considérablement la planète », affirme celui qui, comme Galilée l’a fait avant lui, « questionne » le dogme scientifique.

Ce nouveau texan toxique semble pourtant avoir évolué ces derniers temps. S’il en minore toujours l’origine anthropique, le député républicain ne conteste plus l’existence du changement climatique. Il se demande même comment en contrebalancer les effets.

Modifier l’orbite de la lune

En juin dernier, au cours de l’audition d’une responsable du service fédéral des forêts, le parlementaire s’est interrogé sur la meilleure façon de refroidir le réchauffement. Une idée a surgi : « modifier la course de la lune autour de la terre ». La proposition a laissé sans voix la fonctionnaire. D’apparence anodine, cette remarque prend tout son sens dans le contexte actuel.

Nombre de multinationales américaines entreprennent d’alléger leur impact climatique. De Microsoft à BlackRock, en passant par Wallmart ou Apple, ils visent (presque) tous la neutralité carbone.

Aspirer le CO2

Technophiles, les patrons US en pincent pour les solutions les plus folles et les moins chères. United Airlines vient de conclure un accord inédit avec Carbon Engineering (CE). Cette compagnie canadienne construira une installation capable de capter autant de gaz carbonique dans l’air que rejetteront les avions de la plus grande compagnie aérienne du monde. Si le bilan carbone du transporteur s’en trouvera équilibré, le climat n’en sera pas quitte. Car, le gaz carbonique aspiré par  CE sera revendu à une compagnie pétrolière pour booster la production de ses puits de pétrole et de gaz.

A mesure que les effets du réchauffement se sont sentir, la tentation de les combattre en modifiant les grands cycles bio-géo-chimiques s’accroît. En mars dernier, l’académie des sciences US recommandait de financer la recherche pour renvoyer dans l’espace une partie du rayonnement solaire. Depuis de nombreuses années, des scientifiques de Harvard peaufinent un dispositif de brumisation de sulfates à haute altitude. Là encore pour refroidir le réchauffement.

Tentation dangereuse

Popularisée par la superproduction Geostorm, la géo-ingénierie traîne une sale réputation. Si elle a le potentiel (sur le papier) de rafraîchir le globe, elle n’a pas encore prouvé sa capacité à rafraîchir également toutes les régions de la planète. Une Inde refroidie à côté d’un Pakistan surchauffé : on imagine le résultat d’une climatisation inéquitable.

Refroidir le réchauffement, sans réduire les émissions de CO2, n’aura, de plus, aucun effet sur l’acidification en cours des océans : un phénomène potentiellement dévastateur pour la biodiversité marine. La géo-ingénierie pose aussi de redoutables questions éthiques : qui contrôle le système, quelle en est l’économie, que faire si un pays ne peut plus payer, quel est le régulateur ?

Les délires de Louie Gohmert ont ceci de bon : ils replacent dans le débat public un sujet que la société est loin d’avoir tranché.

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Ancien militaire, passé à l’activisme écologique, Volodia arrose désormais les ennemis du climat à coup d’articles. Créateur de L’Usine à GES, première lettre francophone sur la politique et l’économie du réchauffement, Volodia partage son temps libre entre les dégustation de vins et de cigares. Deux productions qui ne renforcent pas l’effet de serre.

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