France

Snoop Dogg et les JO, par Olivier Cachin

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Face au très hype Patrick Montel, NBC n’a pas hésité à faire appel à un autre grand professionnel du récréatif soporifique en la personne de Snoop Dogg. Toujours sport, Olivier Cachin décrypte pour ZEWEED le génial exercice de com’ du second network US.

Pour ceux qui pourraient être surpris de voir un rappeur commenter les Jeux Olympiques de Paris, on rappellera que l’exercice n’est pas nouveau pour Snoop : en 2021, il avait fait sensation en commentant l’épreuve équestre des J.O., en compagnie du comédien Kevin Hart. Voyant le cavalier faire un pas chassé avec son cheval, il s’est exclamé : « Ce cheval fait un crip walk, cousin ! Trop gangster le canasson, il me faut ce motherfucker dans mon prochain clip ! » Les fans d’équitation n’avaient jamais vu ça ! Le genre de com qui multiplie les clics sur le Net, plus vite que Jésus multipliait les petits pains. Il était donc logique pour Snoop de renouveler l’expérience, cette fois sur toute la durée des Jeux.

Molly Solomon, la présidente de NBC Olympics Production, a depuis confirmé la présence de Snoop parmi les commentateurs de la chaîne pour l’édition 2024 : « Snoop est déjà médaille d’or olympique du commentaire sportif, ayant généré des dizaines de millions de vues pour ses interventions durant les Jeux de Tokyo. Rien que pour cette performance, Snoop a été choisi pour être notre correspondant spécial à Paris. On n’a aucune idée de ce qui va se passer, mais on sait qu’il amènera sa vision unique pour donner une nouvelle couleur à notre show olympique en prime time. »

“On n’a aucune idée de ce qui va se passer, mais on sait qu’il amènera sa vision unique pour donner une nouvelle couleur à notre show olympique en prime time”. Molly Solomon, CEO de NBC Olympics Production

En guise de teaser, Snoop a lâché une vidéo, « Snoop Year’s Eve », où durant une minute quinze, il se paie une tranche de rires avec les athlètes américains Sunisa Lee (gymnastique), A’ja Wilson (basketball), Jagger Eaton (skateboard) et le duo Kelly Cheng/Sara Hughes (beach-volley), concluant l’échange d’une phrase quasi bilingue : « Oui, oui, I’m gonna see you all in Paris, beaunnjoûr ! »
Concrètement, Snoop sera en binôme avec l’animateur Mike Tirico, cinquante-sept ans, vétéran du journalisme sportif, présent sur NBC Sports depuis 2016 et commentateur des matchs de la NFL depuis 2022.

Crédit photo : Youri Lenquette

« Tout au long des Jeux, Snoop évoluera aux côtés de l’animateur de NBC Olympics, Mike Tirico, et offrira au public américain durant les heures de grande écoute, son point de vue unique sur ce qui se passe à Paris. Il visitera les monuments emblématiques de la ville, se rendra à des compétitions et rendra visite aux athlètes, à leurs familles, ainsi qu’à leurs amis », a déclaré NBC, très fière de son coup médiatique qui a déjà eu un énorme retentissement en amont de ces Jeux très attendus. Rappelons que NBCUniversal a déboursé la somme astronomique de 7,8 milliards de dollars pour les droits des Jeux Olympiques jusqu’en 2032, et qu’elle entend bien rentabiliser son investissement.

7,8 milliards de dollars pour les droits acquis par NBC pour couvrir les JO jusqu’en 2032

Du 26 juillet au 11 août, via sa plateforme de streaming Peacock, la chaîne compte diffuser sept mille heures de programmes liés aux Jeux Olympiques. Et, comme le rappelle Rick Cordella, le président de NBC Sports, « une célébrité comme Snoop Dogg n’aurait pas pu faire partie de l’équipe NBC Olympics durant les précédentes éditions mais, désormais, il est un des pivots de notre offre. On se doit d’innover, d’essayer de faire les choses différemment, d’être raccord avec le monde médiatique qui est le nôtre en 2024. »

Concernant le salaire de Snoop, il est fait état de 500.000 dolars/jour. En bon entrepreneur, Snoop a déjà commencé la promo en amont, ne reculant devant aucun superlatif : « Je suis ravi de voir ces incroyables athlètes qui vont se donner à fond à Paris. C’est une célébration de la compétence, du dévouement et de la poursuite de la gloire. Nous allons assister à des compétitions extraordinaires et, bien sûr, j’apporterai le style Snoop dans le mix. Ce seront les Jeux Olympiques les plus épiques de tous les temps, alors restez à l’écoute et ne lâchez rien. Élevons, célébrons et rendons ces Jeux inoubliables, enflammons la compétition et que le meilleur brille comme l’or ! »
Reste la question que se posent tous les lecteurs de ZEWEED : Snoop allumera-t-il un blunt avec la Flamme olympique ? On prend les paris, et on sait que, quoi qu’il arrive, le Dogg saura nous distraire sans (trop) nous enfumer.

Par Olivier Cachin

 

Vivre au frais dans une maison en chanvre.

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Coup de chaud? Ecologique, économique et local, le chanvre est un composant idéal dans l’élaboration d’une habitation régulée. Enquête sur ces nouveaux matériaux qui construiront les maisons de demain.

Qu’on se le dise : construire des habitations déconstruit l’éco-système de la planète. En effet, 8% des émissions de carbone proviennent directement de la production de ciment. Dans le cadre de la transition énergétique, la rénovation des logements français est donc devenue une priorité pour le gouvernement (isolation des combles, des murs intérieurs et planchers, nouvelles obligations d’isolation thermique en copropriété). L’aide de l’État « MaPrimeRénov », lancée en janvier 2020, a déjà été perçue par 125 000 ménages.
L’objectif fixé par la loi prévoit de son coté  100 % de bâtiments basse consommation en France d’ici 2050. La future réglementation RE2020 valorisera ainsi les bilans carbone positifs, et donc les solutions biosourcées issues de cultures locales, l’économie circulaire se conjuguant avec

Le chanvre, champion toutes catégories du stockage de CO2

Le béton de chanvre, mortier plus léger que le ciment, a cette particularité de capter le CO2 là où les autres matériaux de construction en émettent. Composé de chènevotte (partie centrale boisée de la tige du chanvre,) ce mortier vert peut servir à isoler des cloisons comme à ériger des murs. Il suffit simplement de verser ou de « floquer » ce mortier dans une ossature en bois ou en contre-plaqué (moulage).
Cet éco-matériau s’adapte à toutes les formes de projets architecturaux et est pourvu de qualités d’élasticité naturelles qui empêchent la formation de fissures, de condensation ou l’accumulation d’humidité, tout en régulant l’hygrométrie de l’air ambiant (en toutes saisons).

Une matière eco-responsable et ultra-compétitive

Pour répondre à ces enjeux écologiques, les ciments Vicat ont mis au point un matériaux aggloméré composé à 85% de chanvre.
Les parpaings végétaux élaborés par la société française sont élaborés avec des plantes cultivées dans la Haute-Seine.
Deux gammes sont proposées: une adaptée à la construction et l’autre à la rénovation. Toutes les deux offrent le même avantage alors que nous élaborons les habitations de demain: celui d’être composé d’une matière première on ne peut plus green.
Cette initiative 100% made in France a d’ailleurs conquis la ministre chargée de la transition écologique Barbara Pompili, qui a offert un chèque d’encouragement de 100 000€ à l’entreprise grenobloise dans le cadre du plan d’aide à la même transition écologique.

Non toxique, le chanvre remplace avantageusement la laine de verre ou l’amiante, résiste au feu (jusqu’à 300 degrés) et n’absorbe la température extérieure qu’au bout de 10 heures (contre 6 heures pour les autres matières). Les greniers peuvent ainsi rester frais l’été. Cerise sur le parpaing: l’utilisation d’une climatisation est inutile dans une maison isolée en chanvre. Une excellente nouvelles alors que les étés sont de plus en plus caniculaires.

 

 

 

Quand les rois et empereurs de France encourageaient la culture du chanvre

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Pendant des siècles la France et le chanvre ont filé le parfait amour. En attendant que l’Etat et la plante se réconcilient, Zeweed vous invite à parcourir les plus belles déclarations d’allégeance faites au cannabis par les rois et empereurs du pays des lumières.

Charlemagne et le canava

La barbe de Charlemagne était fleurie, nous enseignent comptes et chansons. Mais fleurie de quoi? De cannabis pourquoi pas! Car l’empereur n’était pas insensible aux multiples propriétés et applications du chanvre. Dans son Capitulaire De Villis, Charlemagne invitait vivement ses sujets à la culture du chanvre (appelé alors canava), matière première essentielle à la confection de tissus, toiles, voiles et cordages. “Quid de lana, lino, vel canava ” Qu’en est-il  de la laine, du lin et du chanvre?” avait invectivé le roi des Francs.
(Capitularia de Villis vel curtis imperii, article LXII, Circa 800).

Louis XV libère le commerce du chanvre…

Près d’un millénaire plus tard, en 1720, le régent du jeune roi Louis XV, Philippe d’Orléans, publia un arrêt favorisant l’essor du cannabis agricole : « Arrêt du conseil d’état qui ordonne que le commerce du chanvre dans l’intérieur du royaume sera libre. Fait défense de le faire sortir et de l’envoyer à l’étranger et permet à la Compagnie des Indes d’établir des magasins et le prix des chanvres. » (Imprimerie royale, Paris : Arrêt du 29 décembre 1719, document F-21084-105 de la BNF).

… avant que Louis XVI et Necker n’en fassent une priorité

Peu avant la révolution française, en 1779, c’est Jacques Necker, ministre des finances de Louis XVI qui sera chargé de recenser les provinces cultivant le chanvre et d’encourager cette culture afin de ne pas dépendre d’importations pour cette matière première essentielle.  Comme aujourd’hui, les services de l’État désiraient la mise en œuvre d’une agriculture capable de rivaliser avec l’Empire de Chine ou l’Amérique.
C’est la raison de ce courrier adressé alors à tous les maires de France:
« La France est obligée, Messieurs, de tirer annuellement de l’étranger une grande quantité de chanvre, ce qui fait sortir beaucoup d’argent du Royaume. Le gouvernement, occupé plus que jamais des moyens de remèdes aux inconvénients de l’exportation du numéraire, a pensé qu’il était possible d’augmenter la culture de cette plante au point de ne plus recourir à l’étranger. Pour juger de l’augmentation dont cette production est susceptible, le Roi a déterminé de faire constater de la manière la plus précise la quantité de terrain qui est propre au chanvre dans chaque province. » (Lettre adressée au Maire Consul de Mandelieu, le 5 juin 1779 par Jacques Necker, conservée aux Archives Municipales de Mandelieu – HH1 : « Culture du chanvre », 1779).

1803 : Napoléon ordonne aux préfets de semer

Le 18 février 1803, Napoléon Ier encourageait la culture de cette plante, autrefois essentielle à la fabrication des cordages de la marine militaire : « Paris, 29 pluviôse an 9, Ordre 6585 : Faire semer en France du chanvre. Le ministre fera connaître la quantité de cette denrée qu’il peut acheter cette année. Le ministre la répartira entre les différents départements et arrondissements, en donnant ordre aux sous-préfets et préfets de la faire semer dans les communes. Ils donneront l‘assurance que ce chanvre sera acheté à un prix déterminé, rendu dans un point central désigné. Bonaparte. » (Archive de la marineCorrespondance de Napoléon Ier, publiée par ordre de l’empereur Napoléon III, Tome 8, p. 207, 1861).

A la semaine prochaine pour un nouvel épisode de l’Histoire du chanvre!

Alexis Chanebau

 

Ecrivain, historien et encyclopédie vivante de l’histoire du cannabis , Alexis Chanebau a écrit plusieurs livres sur la belle plante dont le remarquable ouvrage “Le chanvre, du rêve aux mille utilités!“, disponible sur ici sur Amazon

 

Vanille : J’aime les musiques ensoleillées

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 En deux albums, Amazona (2019) et À part entière (2021), la fille de Julien Clerc s’est fait un prénom. À la fois grave et gaie, Vanille crée une bossa nova française, influencée autant par Françoise Sagan que par la caïpirinha. Et pour se donner confiance, elle a un secret : le CBD, naturellement.

ZEWEED : Comment as-tu découvert
le Brésil ?
VANILLE : Par sa musique, que j’adore. Je n’ai jamais aimé les voix trop envoyées. Alors que je cherchais comment je pourrais chanter au mieux, je me suis intéressée à l’histoire de João Gilberto. À ses débuts, il essayait d’être un chanteur pop – ça ne marchait pas. Alors il s’est mis à murmurer, et il a trouvé la voix et la voie de la bossa nova. Moi non plus, je ne mise pas sur le coffre, la démonstration vocale ; mais sur l’émotion, l’interprétation. J’ai compris ça avec João Gilberto. Et puis j’aime Françoise Sagan, dont l’œuvre me rappelle la musique brésilienne : dans les deux cas, il s’agit d’un art de la mélancolie heureuse. À la fin de ma vingtaine, je me suis dit que j’allais créer une forme de bossa nova à la française. Grâce à ma maison de disques, j’avais pu partir enregistrer mon premier album au Brésil.

ZW. : Qui trouve-t-on dans ton Panthéon brésilien ?
V. : João Gilberto par lequel j’ai eu la révélation, Caetano Veloso, Jorge Ben Jor, Seu Jorge et, pour citer une femme, Astrud Gilberto – ses interprétations à la fois naïves et profondes sont incroyables, elles font rêver et voyager. Elle m’a beaucoup inspirée.

ZW. : À côté de la musique brésilienne
la musique française te paraît
pâlichonne et monotone ?
V. : Tu sais, la musique brésilienne peut être monotone aussi ! Le français reste ma langue maternelle, donc celle qui me touche le plus. J’aime les mots, la poésie et les paroles de Barbara, Brel ou Gainsbourg, qui me vont droit au cœur. Comment rester insensible devant la puissance évocatrice de ces mots : « Combien j’ai connu d’inconnues toutes de rose dévêtues ? » (Gainsbourg).

ZW. : Avant ton album Amazona, voyais- tu de bons exemples d’hybridations
entre musiques brésilienne et française ? Peut-être L’Aventura de Sébastien Tellier ?
V. : Je connais bien sûr ce disque ! Les autres exemples ne courent pas les rues, mais il faut citer Pierre Barouh, qui se disait le plus brésilien des Français. Sa musique a énormément de charme, il a fait beaucoup de choses avec Baden Powell. Et n’oublions pas Georges Moustaki, dont « Les Eaux de Mars » est une adaptation de « Águas de Março » ! Bon, tout cela date un peu…

ZW. : Tu as eu ton fils avec un musicien brésilien, Robinho Tavares…
V. : J’étais enceinte au moment du confine- ment, pendant lequel nous avions élaboré mon deuxième album, À part entière, avec Robinho, chez moi en Gironde – deux grossesses en même temps ! À part entière sonne plus chanson française, mais ça reste un disque métissé, avec des sonorités d’ailleurs, de la guitare cocotte tropicale, des rythmes brésiliens comme sur la chanson « La Réponse ». J’ai des origines guadeloupéennes qui font que je ne sais pas précisément d’où je viens. Quand je passe deux jours au soleil, je suis marron foncé. En Inde, on me prend pour une Indienne. Les Antilles ne sont pas loin du Brésil, j’ai un côté caribéen… Quand j’ai eu cette histoire d’amour avec mon Brésilien j’ai ramené dans ma famille cette part de nos racines.

ZW. : Parlons maintenant CBD ! Quel usage en fais-tu ?
V. : J’en prends avant les concerts et les grosses promos en direct. Sur scène on peut se rattraper, mais à la télé les erreurs passent très mal. Avant, ça me terrorisait. Maintenant, avec l’expérience, ça va mieux, mais j’ai encore un peu le trac. Hop, deux ou trois gouttes de CBD sous la langue et franchement ça détend. La fumée, pour la voix, ce n’est pas terrible. Mais en cas de stress ou d’insomnie, les gouttelettes de CBD passent très bien. Ensuite, je conseille de faire un exercice de respiration type cohérence cardiaque. Cette association, c’est top !

ZW. : Depuis quand consommes-tu du CBD ?
V. : Je m’y suis mise par des amis qui en prenaient sous forme de joints. C’est étonnant d’ailleurs, car ça a vraiment le même goût que le joint sauf que l’effet est beaucoup plus léger. Il m’arrive d’en fumer de temps en temps en soirée. Je ne vais pas commencer à prendre du CBD toute la journée comme une dingue, mais mieux vaut ça que des trucs chimiques, des anxiolytiques ou des somnifères. Je suis persuadée que quand on le dose bien, le CBD peut remplacer les cachets.

“Je trouve que la beuh donne plutôt de la bonne musique”

ZW. : Plus jeune tu fumais du cannabis ?
V. : Oui. Le CBD a ce grand avantage de ne pas avoir l’effet parano que peut donner le joint. Le joint peut te mettre en boucle, j’ai déjà une chanson qui s’appelle « En boucle », je suis obsessionnelle, je n’ai pas besoin d’en rajouter! Le cannabis rentre dans le cerveau, alors que le CBD est plus physique, il donne de la légèreté, il détend.

ZW. : De Bob Marley à Snoop Dogg, on connaît plein d’artistes consommateurs de beuh. Et de CBD ?
V. : Je trouve que la beuh donne plutôt de la bonne musique, même si on a souvent cette image de l’amateur de reggae qui arrête de fumer des joints et qui se dit : mais c’était de la merde en fait ? Moi, j’adore Bob Marley ! Pour autant, je ne mélange pas la défonce, l’alcool et le chant. Je suis à la recherche d’une pureté de sentiment, je garde donc ça pour après l’enregistrement. Venant des îles, j’ai un point commun avec JoeyStarr : j’aime beaucoup le rhum, l’alcool qui correspond le mieux au joint – ça rend un peu fou d’ailleurs. Une fois que la séance de studio est terminée, je bois volontiers un bon verre de rhum ambré. Avant l’enregistrement j’ai un autre produit : le CBD, bien sûr !

Crédits photo : Stéphanie Renoma

ZW. : Tu me disais que tu apprécies
le reggae…
V. : Oui j’aime bien les musiques enfumées, ça a un sens que je sois là en face de toi !

“Je bois volontiers un bon verre de rhum ambré. Avant l’enregistrement j’ai un autre produit : le CBD, bien sûr !”

ZW. : Il y a du bon reggae aujourd’hui ?
V. : J’ai l’impression que ça va revenir… Dans mon album À part entière il y avait déjà un côté reggae.

ZW. : Une pop vraiment sous influence CBD ressemblerait à quoi ? Une musique très relaxante ?
V. : Oui. La cocaïne crée une musique froide, désagréable. Le CBD, c’est mieux ! J’ai l’impression que son usage se développe dans le milieu musical, même si le cannabis reste le produit star – pas mal de gens mélangent les deux, comme on met de l’eau dans son vin. Au Brésil je n’ai pas encore vu beaucoup de CBD, alors qu’on en trouve partout en Suisse ou en Allemagne, où je suis allée chanter.

ZW. : Au Brésil on prend quoi ?
V. : La cachaça, l’alcool qu’on met dans la caïpirinha et qu’ils boivent pure en chupitos. C’est de l’alcool de sucre, comme le rhum, ça doit rendre un peu fou aussi…

ZW. : As-tu déjà un nouvel album dans les tuyaux ?
V. : Je suis justement en train d’écrire : j’ai sept ou huit morceaux. J’ai dans l’idée une pop folk et fraîche – ce sont les mots qui me viennent. J’espère que ça sortira fin 2024, mais pour l’instant je ne suis pas encore prête à enregistrer. En parallèle je prépare une tournée d’une dizaine de dates pour cet été, le « Suivre le soleil Tour », du nom de ma chanson « Suivre le soleil », qu’on trouvait sur mon album Amazona. Cette chanson fait son petit bonhomme de chemin, elle prend 20 000 écoutes par jour sur Spotify, on en est à 10 millions en tout. Cela prouve que, dans notre monde anxiogène, les gens ont besoin de lumière, de messages positifs. Je serai seule avec ma guitare, et je lancerai des boucles avec mon clavier. Ce sera une reconstitution sur scène de mon home-studio, et je parlerai beaucoup au public, il y aura une interaction. Avant chaque date, peut-être prendrai-je quelques gouttes de CBD !

Entretien Louis-Henri de La Rochefoucauld
Dates de tournée à retrouver sur l’Instagram de Vanille,
@vanillemusic

 

L’appel du 18 joint

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L’appel des 18 juin et 18 joint ont cela de commun qu’ils sont tous deux une invitation à la liberté. Si le voeu du grand Charles a été exhaussé un 8 mai 1945 avec la signature de l’Armistice, le combat en faveur de la libération de l’Herbe, toujours sous occupation de la loi du 31 décembre 1970, continue de faire des victimes. ZEWEED fait le point sur la fête pro-ganja la plus vieille de l’hexagone, dont nous pourrions bien fêter cette année la dernière édition, le débarquement des élections législatives le 30 juin et 7 juillet  ayant de forte chances de trancher pour les 3 prochaines années la question de la légalisation du cannabis en France.

Nous sommes en 1976. La France de Giscard, dont le septennat a commencé en 1974, se veut moderne et dynamique.
Alors que les cendres de Mai 68 crépitent encore dans l’inconscient collectif la nation s’agite autour de sujets brûlants comme l’avortement, le divorce et l’âge de la majorité.
Cette même année, les Pays-bas font passer une loi pour dépénaliser l’usage du Cannabis, jugeant un encadrement favorable à une prohibition.
C’est du jamais vu en Europe et c’est un déclencheur pour cette pétition qui dénonce une justice à deux vitesses. Un système tronqué qui autorise les descentes de policiers pour une simple odeur d’herbe chez les plus défavorisés mais laisse “les gros bonnets de l’héroïne tranquille”.

Armée (du gros) rouge contre maquisards de la weed.

Un système d’autant plus absurde que la France se veut libérale dans ses valeurs et qu’elle est déjà marquée par un certain nombre d’addictions tout à fait légale comme le rappelle l’introduction du texte: “Cigarettes, pastis, aspirine, café, gros rouge, calmants font partie de notre vie quotidienne. En revanche, un simple joint de cannabis (sous ses différentes formes: marijuana, haschich, kif, huile) peut vous conduire en prison ou chez un psychiatre.”
Deux choix franchement pas très planants.

Roland Topor, Jean-François Bizot et Moebius entrent en résistance

Parmi les premiers signataires de cette lettre ouverte on retrouve des artistes de tous bords comme Roland Topor, Jean-François Bizot ou Moebius mais aussi des “grands esprits” comme André Glucksmann ou Bernard Kouchner. Un texte que vous pouvez retrouver dans son intégralité sur le site du magazine Libération ici

En 1993 le texte revient dans une version mise à jour sur le devant de la scène grâce au CIRC (le collectif d’information et de recherche cannabique) créé deux ans plus tôt.
Le collectif dénonce le ridicule de la théorie de l’escalade selon laquelle le Cannabis serait une porte vers des drogues bien plus dures rappelant que cela n’est vrai que pour 5% des consommateurs (et que c’est tout aussi vrai des antidépresseurs prescrits par les psychiatres).

C’est quoi, ce CIRC?

La logique est simple: les gens fument déjà autant s’assurer de la qualité de leur consommation et démanteler les trafics mafieux qui bénéficient de cette manne illégale. Des arguments très clairs et toujours d’actualité qu’on retrouve déjà dans un reportage de FR3 ressorti par l’Ina.
Cette nouvelle version qui inclut aussi la notion vitale de Cannabis médical sera signée par encore plus de grands noms comme Frédéric Beigbeder, Olivier Besancenot, Philippe Manoeuvre, Noël Mamère et Cécile Duflot.

Cette année sera la première sans un des grands rassemblements du 18 joint organisé par le CIRC, une tradition lancée en 1993 à Paris et à Lyon qui s’est répandue dans toute la France.
Malheureusement Pandémie (et surtout politique) oblige cette année pas de grand rassemblement  puisqu’il est interdit d’organiser des rassemblements de plus de 10 personnes dans un lieu public.

 

Faite votre 18 joint, et faites tourner!

Qu’à cela ne tienne, Zeweed vous propose d’organiser votre propre rassemblement pour l’année prochaine… en espérant qu’il n’ai pas à avoir lieu…. Le Circ propose -au cas où- un guide très accessible pour organiser votre propre rassemblement du 18 joint en six étapes.
Comme ils le rappellent sur leur site  ”le cannabis n’est ni de droite, ni de gauche. C’est une plante utile pour l’humanité qui pousse sous toutes les latitudes”.
Un point qu’on ne saurait que valider puisque même en Corée du Nord, la plus stricte dictature mondiale, le cannabis pousse librement.
Fumeurs du monde entier, unissez-vous!

Quand la Police prône la légalisation du cannabis

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Entre saisies abusives, arrestations pour quelques grammes ou amendes pour détention de « stups », les relations entre fumeurs et forces de l’ordre ont toujours été mauvaises. Mais certains ont une vision à rebrousse-poil de leurs collègues et de la législation prohibitionniste en vigueur. ZEWEED a rencontré Bénédicte Desforges, ex-lieutenant de police et présidente du collectif Police Contre la Prohibition (PCP).

ZEWEED : Des forces de l’ordre en lutte contre la prohibition, ce n’est pas banal. Pouvez-vous vous présenter, vous et votre collectif ?
Bénédicte Desforges : Je suis une ex-flic qui a toujours travaillé en uniforme sur la voie publique, à Paris et en banlieue. J’ai été dans la police nationale pendant une quinzaine d’années, dans les Hauts-de-Seine et à Paris, dans le 18e arrondissement – des secteurs pour le moins criminogènes.
Pour ce qui est du PCP, c’est un collectif de policiers qui s’intéressent aux problèmes liés aux drogues. Après avoir échangé entre nous, l’idée est venue fin 2018, de monter ce collectif car nous avions les mêmes intérêts et les mêmes conclusions concernant les stupéfiants ; à savoir, légalisation du cannabis et dépénalisation des usages. Il s’agissait surtout de faire entendre la voix de ceux qui se trouvent en haut de la chaîne pénale. Avocats, magistrats et autres associations existaient depuis longtemps mais les policiers, eux, ne se faisaient pas entendre. Nous devions amener notre parole et apporter un point de vue utile qui manquait. Le collectif est constitué d’une douzaine de membres qui en forment le noyau dur. Autour gravitent plusieurs dizaines de policiers qui nous suivent, nous soutiennent.

ZW : On vous voit souvent sur Twitter parler de joint, répondre à des tweets sur le cannabis avec humour et détachement. Est-ce que vous fumez ou avez fumé par le passé ?
B.D. : Certains, oui et d’autres, non. En réalité, on ne pose même pas la question. Pour nous, c’est un sujet qui relève entièrement de la vie privée et on veut que ce le soit également aux yeux de la loi.
Demander si quelqu’un fume est aussi pertinent que demander à quand remonte sa dernière cuite. Ce qui regarde un policier, c’est de savoir si l’individu risque d’être un danger pour autrui. Un simple exemple sur ce sujet : on souhaite que les conducteurs soient soumis à des tests comportementaux plutôt que de drogue, qui peuvent vouloir tout et rien dire. Concernant le PCP, on a été régulièrement accusés par d’autres flics d’être des gauchos, des collabos ou des toxicos alors que notre approche dépasse largement ces questions. Mais, maintenant, nous n’avons plus droit à ces qualificatifs : de plus en plus de policiers nous soutiennent, reconnaissant la justesse de nos analyses. Et ça ne vient pas toujours des plus progressistes ; preuve s’il en fallait que nos idées peuvent parler à tout le monde, indépendamment des étiquettes politiques ou des idées préconçues.

ZW : Comment agissez-vous pour faire avancer ces idées ?
B.D. :On discute régulièrement entre nous pour savoir comment intervenir sur tel ou tel sujet, sur les réseaux sociaux. Concrètement, on incite nos collègues à ne plus faire de procédures contre les consommateurs. On ne les aborde pas en leur disant qu’il faut légaliser le cannabis. On leur dit surtout que, s’ils ne se posent pas la question, ils cautionnent la politique du chiffre qu’ils dénoncent à longueur de journée. Chacun dispose d’un libre arbitre et peut fixer une limite à ce qu’il va retenir ou non comme infraction.

ZW : Aujourd’hui, vous n’êtes plus dans la police. Comment cela se passait sur le terrain, lorsque vous étiez en service ?
B.D. : J’ai démissionné en 2012. Ma chance était de travailler dans un service insensible à la politique du chiffre. Si on ne voulait pas interpeller pour une barrette de shit, on ne le faisait pas. Il existe des criminalités bien plus gratifiantes dont il faut s’occuper. Avec mes collègues, on avait tous cette position consistant à dire : « Cette répression est inintéressante, inutile et ne sert qu’à alimenter la politique du chiffre. » C’est un peu comme pour les piétons : personne ne verbalise ceux qui traversent au-delà des passages cloutés. Pour nous, cette logique s’applique aussi au fumeur de joints.

ZW :Vous pouvez détailler cette politique du chiffre ?
B.D. :La répression du délit d’usage de stupéfiants est simple : c’est un délit sans victime et, dès qu’il est constaté, il est à 100 % élucidé. C’est la poule aux œufs d’or de ce système. Dans les faits, les cadres de la police touchent des primes qui sont subordonnées à l’activité des effectifs. Les chefs mettent la pression pour toucher plus d’argent. Donc certains mettent l’accent sur l’usage de drogues dans cet objectif. Mais ce qui est curieux, c’est que les collègues se plaignent de tout ça, sans jamais faire le lien avec le besoin d’une réforme globale.

ZW : En 2020 a été mise en place l’amende forfaitaire délictuelle (AFD), avec un objectif : simplifier le travail des policiers qui n’ont plus à emmener un fumeur de joint au commissariat. Qu’en pensez-vous ?
B.D. : Des remontées dont on dispose, il s’agit d’une usine à gaz. On sait très bien que beaucoup ne vont jamais les payer et, d’ailleurs, le taux de recouvrement est juste d’un tiers. Aujourd’hui, on n’observe pas d’efficacité à ce dispositif répressif. L’AFD n’a d’impact ni sur les taux de consommation, ni sur l’accessibilité aux drogues, ni sur le trafic. Elle mobilise un temps considérable des forces de l’ordre et alimente les bilans statistiques de Beauvau. Loin d’un souci de santé publique, cette amende répond au nouveau mantra du gouvernement : la responsabilité et la complicité des consommateurs.

ZW : Quelles seraient vos préconisations pour en finir avec la situation actuelle ?
B.D. : Pour commencer, il faudrait un système comme au Portugal. Du point de vue du PCP, c’est l’usage de toutes les drogues qu’il faudrait dépénaliser pour soulager le travail de la police en se passant d’une répression inefficace. Et, pour couper l’herbe sous le pied des dealers, il faut évidemment légaliser le cannabis. Cela passe par tous les fronts, de l’autoproduction aux initiatives, comme les social clubs en Espagne. Il est hors de question de tout laisser entre les mains du marché noir et de se priver de produits de qualité, ainsi que de campagnes de prévention plus fluides.
J’insiste sur ce point : légalisation et dépénalisation sont compatibles. Du point de vue de la police, uniquement légaliser en pensant que cela va soulager notre travail est un non-sens, car le marché noir persistera et on nous demandera toujours d’interpeller et de faire des saisies. De plus, comment distinguer un joint légal d’un joint illégal ? Il faut que la police puisse être réorientée sur des activités utiles et la répression des consommateurs n’en est pas une.

Bénédicte Desforges

ZW : Lors des élections de 2022, le sujet du cannabis, et plus largement les thématiques sociales, ont complètement disparu du débat public. Qu’est-ce que cela dit de nos politiques à ce sujet ?
B.D. : On observe toujours la même chose. À l’approche du scrutin, des promesses de loi très frileuses voient le jour pour ratisser les quelque cinq millions de fumeurs, mais cela ne va jamais plus loin. De toute façon, cela nous intéresse peu, au PCP. La dépénalisation de toutes les drogues n’est jamais présente. Rajoutons la volonté de contrôler le taux de THC, la manière de distribuer… Ils veulent tellement plaire à l’opinion que, dans les faits, leurs propositions ne sont pas convaincantes.

ZW : Le climat en France ne semble pas tendre vers des mouvements de gauche, c’est même l’inverse. Peut-on encore espérer des avancées dès lors que la droite semble remporter la bataille culturelle ?
B.D. : Pour le dire clairement, au PCP, on se fiche des discours prohibitionnistes de droite. Ils sont dans leur rôle et c’est prévisible de les trouver sur une ligne dogmatique. En revanche, que fait la gauche ? Pourquoi, lorsqu’il y a une fusillade sur fond de trafic de stupéfiants, on ne voit jamais débarquer un élu de gauche sur les plateaux ? Pourquoi ne pas profiter de ces faits divers pour insister sur le fait qu’ils sont le fruit de la guerre contre la drogue qui est inefficace et produit toujours les mêmes causes depuis cinquante ans ? Le problème, c’est que la gauche fuit les questions sécuritaires alors que ce sont bien des arguments sécuritaires qui pourraient faire pencher l’opinion.

ZW :C’est-à-dire ?
B.D. : Au PCP, nous avons toujours refusé de bâtir notre argumentaire sur la santé publique. Déjà car nous voyons surtout, en tant que policiers, le désastre sécuritaire, mais également car nous refusons d’avoir une posture morale et infantilisante. On n’estime pas qu’une personne qui se drogue est problématique par nature. La liberté individuelle, tant qu’elle n’empiète pas sur celle des autres et sur leur sécurité, est notre philosophie.
Maintenant, regardons ce que disent les pro-légalisation. Leur discours est démesurément porté sur la santé publique. Est-ce que cela fonctionne sur les consommateurs ? A-t-on déjà vu une personne ne pas goûter une drogue de peur de devenir addict ? Cela n’existe pas ! Même chose pour ceux qui n’ont jamais fumé et qui sont contre. Quel argument va les faire réfléchir ? La peur qu’un inconnu devienne accro à un produit ou un argumentaire chiffré sur le coût à la société de la répression ?
Nous sommes certains que le second sera bien plus efficace que le premier. J’en veux pour exemple que chaque discours, chaque tribune, chaque article évoque toujours le fait que la France est le « premier consommateur » ou qu’il faut agir face à une « catastrophe sanitaire », lorsque l’on parle du cannabis. Mais ce n’est pas vrai : il n’y a aucune catastrophe sanitaire liée à la consommation de cannabis en France. Nous sommes les premiers consommateurs, oui ; et alors ? Il faut surtout matraquer que nous dépensons énormément d’argent et d’énergie pour attraper des dealers, remplacés le soir même, et des gens bien insérés qui veulent se détendre le soir avec un joint, alors que cela pourrait être redirigé sur des enquêtes plus importantes pour la société.

Propos recueillis par Vincent Geny en mars 2024
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“Cannabis”, l’enquête qui pose les bonnes questions

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Le 2 avril prochain, au lendemain de la légalisation du cannabis en Allemagne, France 5 diffusera en prime time « Cannabis », un documentaire réalisé par Antoine Robin et présenté par Mathieu Kassovitz.  ZEWEED a pu voir en exclusivité cette enquête choc, dont nous vous livrons ici les grandes lignes.

Alors que le trafic de cannabis est au cœur de l’actualité avec les opérations  « Place Nette », la chaîne du service public France 5 (France télévisions) a choisi de diffuser un documentaire qui interroge sérieusement le bien-fondé de la politique menée par son employeur.

Mathieu Kassovitz est allé questionner addictologues, dealers, consommateurs, politiques et forces de l’ordre, pour dresser un état des lieux de 50 ans de prohibition en France, à ce jour la plus sévère d’Europe. Paradoxe : l’Hexagone est le pays qui compte le plus grand nombre de fumeurs de joints, avec près de 6 millions d’enthousiastes de l’herbe qui fait planer.

L’enquête se poursuit dans les pays où le cannabis est déjà légalisé ou dépénalisé : au Maroc, en Espagne, au Pays-Bas et enfin au Canada, qui a entièrement légalisé en 2018, et où le réalisateur de La Haine a rencontré son premier ministre, Justin Trudeau.

Ce 90 minutes libre arbitre, sans préjugés “pour ou contre la légalisation” se veut une invitation à ouvrir le débat sur cette question de société qui fait régulièrement les grands titres de la presse comme des journaux télévisés.

« Mon but n’est pas qu’on légalise le cannabis mais qu’on se pose la question» précisait à cet effet Mathieu Kassovitz à l’occasion d’une interview accordée à nos confrères de 20 minutes.

Il ne fait aucun doute que “Cannabis” pose les bonnes questions. Reste à savoir si elles seront entendues et quelles réponses y seront apportées.

Cannabis – Une enquête de Mathieu Kassovitz et Antoine Robin d’Antoine Robin sera diffusé mardi 2 avril à 21.05 sur France 5, et sera suivi d’un débat sur cette très actuelle question de société
France Télévisions proposera également  une version longue de cette enquête,  dans un format découpé (soit 10 épisodes de 20 minutes), disponibles dès le mardi 2 avril, sur la plateforme web France.tv.

Quand la France chantait le chanvre

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Autre temps, autre mœurs ! Pendant des siècles et jusqu’à sa prohibition mondiale en 1961, le cannabis était librement cultivé en France. Utilisé pour tisser cordes et voiles ainsi que la fabrication de nos habits -du lange pour bébé au linceul-, le chanvre était partout. En mémoire de cet âge d’or et en attendant le retour de la belle plante dans notre vie quotidienne, Zeweed a retrouvé trois hymnes d’antan célébrant son usage.

La Chanson du Chanvre de Louise Michel (1830-1905).
Composé en 1886 par d’une des figures majeures de la Commune de Paris, ce chant de révolte rappelle l’utilisation du chanvre en tant que matière première et revenu de base d’autrefois

La chanson du rouet (1857).
Le texte est de Charles-Marie Leconte de Lisle (1818-1894), célèbre auteur de La Marseillaise, qui passa une grande partie de sa jeunesse en Bretagne, près de Dinan, où les rouets filaient le chanvre nécessaire à la confection des voiles et cordages des navires. Pendant trois siècles, du XVIème au XIXème,  la Bretagne en exporta dans le monde entier, faisant la fortune de cette région.

« Ô mon cher rouet, ma blanche bobine,
Je vous aime mieux que l’or et l’argent !
Vous me donnez tout, lait, beurre et farine,
Et le gai logis, et le vêtement.
Ô mon cher rouet, ma blanche bobine,

Vous chantez dès l’aube avec les oiseaux;
Eté comme hiver, chanvre ou laine fine, 
Par vous, jusqu’au soir, charge les fuseaux.”

A l’origine, la musique était de Georges Bizet. Quarante ans plus tard, Maurice Ravel composera sa propre version, ici interprétée par Jessye Norman:

Il existe aussi des adaptations plus rurales à partir du texte original à l’instar de cette interprétation:

La route du chanvre, de Pierre Dac (1941)
Cette chanson a été composée pendant la seconde guerre mondiale par le célèbre comédien-humoriste Pierre Dac (futur partenaire de Francis Blanche), pendant son incarcération en 1941 à la Carcel Modelo, prison modèle de Barcelone. Libéré en 1943 contre quelques sacs de blé et des fûts d’essence négociés entre Espagnols et Britanniques grâce à la Croix-Rouge française, Pierre Dac rejoindra finalement Londres où ce chant de résistance fut enregistré et diffusé en direct à la BBC. Il faut rappeler qu’avant l’arrivée des fibres synthétiques dans les années 1950-60, le chanvre (cannabis sativa) était communément considéré comme la plus solide des fibres végétales, la référence absolue pour la confection des cordes et notamment celle du gibet, pour pendre les traitres où les ennemis. Extraits :

« Amis, chantons avec ferveur,
Le chanvre purificateur.
Pour faire justice prompte,
Le chanvre aura, par ma foi,
Dans le règlement de compte,
Une place de premier choix.

Holà ! Les Laval et consorts,
Voilà ce que s’ra votre sort,
Et cependant, à tout prendre,
Vous êtes tombés si bas,
Que la corde qui va vous pendre
Vous ne la valez même pas.

Regardez bien, mauvais larrons,
Le beau chanvre que nous tressons,
Venez, venez à la ronde,
Sans bousculade, approchez,
Il y en aura pour tout l’monde,
C’est l’moment d’en profiter ! »

 

Ces cordes de chanvre qui ont changé l’histoire

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Avant l’arrivée des matières synthétiques dans les années 1950-60, les fibres textiles issues de la tige du cannabis sativa étaient universellement reconnues comme étant les plus solides et les plus résistantes au sel et à l’humidité, faisant de la plante une denrée stratégique majeure.

Durant des siècles, le chanvre était une matière première indispensable pour les marines de guerre (la norme pour la confection des cordes et voiles), servant aussi également aux armées de terre pour actionner diverses machines ou engins offensifs (catapultes, balistes, frondes, arcs, arbalètes, échelles de cordes, etc.). Voici quelques exemples illustrant ces hauts faits imputables à notre matière première préférée.

 La guerre de cent ans (de 1337 à 1453)

Lors de cet interminable conflit, les archers gallois recrutés par l’armée anglaise massacrèrent régulièrement la noble cavalerie française à l’aide de leurs célèbres grands arcs en bois d’if, hauts de deux mètres, appelés « Longbow ». La corde permettant de les actionner était spécifiquement tissée en chanvre, quelquefois en soie, cirée pour être imperméabilisée contre la pluie, son coût de fabrication comptait pour la moitié du coût total de l’arc. Une certaine force était nécessaire pour subir la pression de 50kg exercée par la corde tendue, et pour être capable de tirer une dizaine de flèches par minute jusqu’à 300 m de distance.

Cette arme se révèlera particulièrement décisive lors de la bataille de Crécy (le 26 août 1346), opposant 40 000 français aux 15 000 anglais d’Edouard III, dont 6000 archers gallois. Ceux-ci décochèrent 50 000 flèches par minute sur l’armée de Philippe VI qui ne disposait, en réponse, que de mercenaires arbalétriers génois utilisant des cordes en cheveux et crin, sans force et sans précision quand elles étaient humides, alors que les cordes rustiques en chanvre des Longbbows gagnaient en dureté une fois mouillées. La fine fleur de la chevalerie française y fut ainsi allègrement décimée, dans un terrible fracas nimbé de pluies d’orage.

Archers anglais lançant leurs flèches en chargeant des chevaliers français à la bataille de Poitiers (Bibliothèque nationale d’Autriche/AKG-Images)

Le personnage de Robin des Bois, mythique archer anglais équipé de son Longbow, est un symbole romanesque de la révolte des paysans contre la noblesse anglaise en 1381. C’est par peur d’un tel soulèvement armé en France, que sous Charles VI, la noblesse obtint la suppression de la formation des archers ce qui valut aux Français d’être à nouveau surclassés à la bataille d’Azincourt en 1415.

La bataille de Fleurus (1794)

Le 26 juin 1794, le destin de la toute jeune république française ne tenait plus qu’a un fil : lors de la bataille décisive de Fleurus (Belgique), un cordage de chanvre actionné par 64 français, guidait, en effet, le tout premier ballon d’observation militaire du monde, pour épier et déjouer le dispositif des armées coalisées (Angleterre, Autriche, Pays-Bas, Hanovre) s’apprêtant à envahir la France, victime du chaos de la révolution.

Ce ballon captif à hydrogène nommé « L’Entreprenant », placé sous le commandement de son inventeur, le chimiste Coutelle, permettait d’observer jusqu’à 29 km, une avance de troupe d’au moins une journée de marche. Les observations étaient glissées jusqu’au sol le long d’un câble dans un petit sac en cuir. La vue de l’aéronef terrorisait l’ennemi nota Coutelle dans ses mémoires : « L’effet moral produit dans le camp autrichien par ce spectacle si nouveau fut immense ; il frappa surtout les chefs qui ne tardèrent pas à s’apercevoir que leurs soldats croyaient avoir affaire à des sorciers ». Finalement, les Autrichiens levèrent le camp, les Anglais retraversèrent la Manche le jour même, et le ballon fut tiré « comme un toutou au bout de sa laisse » sur 45 kilomètres, pour aider à reprendre les villes de Bruxelles et d’Anvers. C’était le tout début de la guerre aérienne et la France sera sauvée de l’invasion.

L’Entreprenant, ballon monté par Coutelle, lors de la bataille de Fleurus en 1794 (« Collection Tissandier », Library of Congress, Washington).

Bohémond et la prise d’Antioche

Voici comment, par une nuit de mai 1098, Bohémond de Tarente, prince normand du diocèse de Coutances et chef de l’armée des Francs de la première croisade, escalada le premier le mur d’Antioche (située de nos jours en Turquie), afin de prendre le contrôle de la ville fortifiée, après huit mois de siège : « Il tenoit en ses mains une eschiele de cordes de chanvre mout soutilment fete [faite avec art]. » (Guillaume de Tyr, Historia rerum in partibus transmarinis gestarum, chapitre 21, récit du 12ème siècle). L’extrémité inférieure de cette échelle de chanvre envoyée par Firouz, un garde arménien qui dirigeait la tour des Deux Sœurs, était garnie de crochets ferrés pour la fixer, tandis que la partie supérieure devait être fortement attachée sur le revêtement des remparts.

Photo : dessin original de Gustave Doré : Bohémond et ses troupes escaladant les défenses d’Antioche, paru dans Histoire des croisades, de J. Michaud, (Paris, 1877, vol. 1, planche p. 82).

Le débarquement des Alliés en Normandie (1944)

Lors du débarquement allié de Normandie, le 6 juin 1944, les rangers américains commandés par le lieutenant-colonel James E. Rudder, sont parvenus à escalader la falaise de la pointe du Hoc, grâce à leurs échelles de cordes de chanvre, fixées à l’aide de quelques grappins.

Cette action a été déterminante, pour finir de neutraliser l’artillerie lourde allemande, qui pilonnait l’arrivée des alliés sur les plages de Utah Beach et de Omaha Beach.
Lors de la seconde guerre mondiale, les fibres de chanvre furent utilisées massivement pour confectionner les toiles et suspentes de parachutes, les toiles de tente, les cordages, hamacs, sacs et uniformes militaires (jusqu’aux coutures de bottes des rangers).

Photo : L’escalade de la pointe du Hoc en juin 1944 (Conseil Régional de Basse-Normandie / National Archives USA).

 

Cannabis MasterClass

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Biologiste de renommée internationale, normalien, agrégé de Sciences naturelles, professeur de physiologie cellulaire à Paris VI, président de la Société des Neurosciences, chevalier de la Légion d’Honneur, directeur de recherche au CNRS, Joël Bockaert force le respect comme l’admiration. À l’occasion de la sortie de son ouvrage Le cannabis, quelle histoire ! , nous avons pu lui poser quelques questions sur cette masterclass cannabique de 160 pages.

Que sait-on déjà des utilités médicales du cannabis ?
Nous pouvons compter quatre effets positifs confirmés du cannabis à usage médical quand il est administré à juste dose.
Déjà, ses propriétés anti-nauséeuses et anti-vomitives, salvatrices pour les patients sous chimiothérapie ou atteints du sida. Mais aussi ses propriétés antispasmodiques, efficaces pour calmer et prévenir les crises de spasmes de patients atteints par la sclérose en plaque. On peut aussi parler des propriétés antiépileptiques du CBD (pour des épilepsies résistantes aux traitements conventionnels ) et des vertus antalgiques du THC qui permettent aussi de réduire des douleurs chroniques. Il faut cependant souligner que ce sont des traitement de soulagement qui ne sont pas curatifs. Parmi les effets positifs mais à confirmer; une amélioration du sommeil, une stimulation de l’appétit et des propriétés anxiolytiques.

Et de ses effets néfastes ?
Rappelons d’abord que la quantité absorbée et la concentration en THC sont deux facteurs clefs des effets délétères du cannabis. En trente ans, la concentration en THC du cannabis issu du marché illégal est passée de 3-4 % pour l’herbe des années 90 à 25-32% pour la Skunk ou la Chem Berry. Sans parler des produits de synthèse analogues du THC (K2, Spice Black Mamma…) qui sont bien plus puissants et dangereux. Les effets délétères aigus d’une consommation excessive momentanée de THC sont les crises d’angoisse, les états oniroïdes (rêves éveillés) et les psychoses cannabiques. A cela il faut ajouter les dangers d’accidents, notamment automobiles. Les effets délétères sur le long terme peuvent être un manque de motivation, un affaiblissement de la mémoire, des déficits cognitifs, parfois le déclenchement d’une psychose endormie ou des complications cardio-vasculaires. Ces effets sont particulièrement graves chez les adolescents.

Quand on parle de CBD peut-on parler d’une ruée vers « l’or vert » ?
Il y a un marché incontestable et bientôt colossal du CBD (un des composant du cannabis non psychotrope) maintenant qu’il est légal d’en vendre et d’en consommer en Europe, avec un nombre de boutiques et de produits à base de chanvre qui ne cesse d’augmenter. Il y a visiblement une offre et une demande croissantes et des profits à faire. Mais les profits les plus faramineux, au niveau mondial, restent ceux du cannabis récréatif.

Combien de temps faudrait-il à la France pour devenir leader du marché du chanvre ?
La France a déjà régné sur le marché du chanvre à usage agro-industriel jusqu’au début du XXème siècle et en est aujourd’hui le quatrième producteur mondial. Le chanvre agro-industriel  produit en France contient moins de 0,2 % de THC. Il est utilisé légalement pour faire des vêtements, du plastique, du bio-carburant, des isolants etc… Rien ne s’oppose à ce que la France redevienne le leader mondial de ce marché en moins de 10 ans avec un produit du terroir !
Reste à développer une filière du cannabis thérapeutique (qui sera vraisemblablement légalisé en France ) et récréative… si la légalisation progressive du cannabis est décidée en France.

Pouvez-vous nous faire un état des lieux du succès ou de l’échec des politiques répressives actuelles ?
La politique répressive actuelle est un indéniable échec. Avec seulement 10% du cannabis récréatif saisi, plus de 4000 points de ventes partout en France, même si on en fermait un par jour,  il faudrait dix ans pour les supprimer tous. Nous sommes un des pays qui consomme le plus de cannabis au monde. L’alcool et le tabac -beaucoup plus dangereux pour la santé- sont en vente libre alors que la consommation ou la vente de cannabis est illégale. Cette incohérence fondamentale est une des raisons de l’échec cuisant de notre politique de répression.

Doit-on penser une légalisation du cannabis qui s’accompagne de campagnes d’information ?
Ce qu’il faut, c’est proposer un débat sans idéologie qui mettra face à face le pour et le contre d’une légalisation ainsi que des moyens d’y parvenir. Pour que ce débat existe, une campagne d’information est absolument nécessaire. Il s’agit d’analyser les effets positifs et négatifs de la légalisation.
Positifs : une vente de produits bien contrôlés notamment pour le taux de THC, la possibilité de faire des campagnes massives d’information sur les dangers d’une consommation excessive, la réduction de trafics illégaux et le dégagement de recettes fiscales.
Négatifs : légaliser une drogue est un acte problématique pour n’importe quel politique face à un cannabis illégal qui risque d’être moins cher et toujours plus fort en THC. Il faudra aussi trouver une autre ressource de revenus et d’emploi pour tous ceux qui vivent indirectement du trafic. Ce qui est le point le plus problématique. Seul un vote populaire pourrait trancher. Notons que la meilleure politique, quand il s’agit de drogues, est toujours celle qui éduque, accompagne et sollicite ses citoyens plutôt que celle qui les puni et les infantilise.

Quels seraient les effets d’une légalisation totale ou partielle sur le marché noir ?
On peut espérer qu’une partie du trafic soit supprimée. Les usagers « raisonnables » préférant acheter des produits « sûrs » et légaux. Mais il faut nuancer les choses: l’éradication totale du trafic sera très difficile et l’on ne défait pas en un jour un système qui s’est construit sur des décennies et qui rapporte beaucoup.

Qu’attendez-vous de ce livre?  Est-ce l’aboutissement d’un propos ou le début d’un débat ?
Ce livre a pour but de dresser le tableau le plus réaliste possible de l’histoire, du potentiel économique énorme du chanvre agro-industriel, du rôle socio-culturel du cannabis, de ses effets positifs et négatifs avérés afin d’organiser  un débat sérieux fondé sur des références scientifiques et des rapports publiés.

Joël BOCKAERT
Cannabis, quelle histoire!
UGA éditions
12€

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