Entamée en 2021, l’expérimentation du cannabis médical doit prendre fin en mars 2024. Alors que les professionnels de la santé souhaitent que le médicament vert soit disponible le plus rapidement possible auprès de 300 000 patients en échec thérapeutique, sa prise en charge ne figure toujours pas au plan de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS). Or, sans inscription au PLFSS, pas de remboursement possible et donc pas de traitements envisageables à terme. Quel avenir dans l’Hexagone pour les spécialités à base de cannabinoïdes? Eléments de réponse.
Si l’absence du cannabis à visée médicale au PLFSS est de mauvaise augure pour les acteurs de la filière, elle l’est encore plus pour 300 000 patients en échec thérapeutique, qui risquent de se voir privé de cette alternative naturelle pourtant déjà prescrite dans 21 pays de l’Union européenne.
Interpellé dans une tribune parue jeudi 28 septembre dans le Parisien, au sein de laquelle 17 associations demandent la légalisation du cannabis thérapeutique “dès l’année prochaine“, l’exécutif a choisi d’apporter une réponse ambigüe. Interrogé sur France Inter mardi 3 octobre, le ministre de la Santé Aurélien Rousseau a tenté de rassurer producteurs, prescripteurs et malades en évoquant la mise en place d’un statut ad hoc début 2024, assurant aux patients suivis dans le cadre de l’expérimentation du cannabis médical que leur traitement serait bel et bien pris en charge.
“Il y aura des éléments sur le cannabis thérapeutique qui n’ont pas forcément besoin du PLFSS. A partir de janvier 2024, nous allons mettre en place un cadre ad hoc (sur le cannabis thérapeutique pour les patients inscrits à l’expérimentation NDLR)” précisait Aurélien Rousseau au micro de France Inter, bottant habilement en touche “comme beaucoup de pays européens, nous avons expérimenté le cannabis thérapeutique. Mais on a pas, à l’échelle européenne, d’autorisation de mise sur le marché (AMM) parce que c’est compliqué d’avoir des données scientifiques“.
70 % des patients ont constaté une amélioration significative de leur qualité de vie
Malgré ce manque de données scientifiques qui empêcherait la prise en charge du cannabis thérapeutique et son inscription au PLFSS, Aurélien Rousseau convient de l’efficacité de la plante auprès des patients “globalement, c’est concordant sur un certain nombre de pathologies (…) donc il y aura un cadre ad hoc, et il n’y aura pas de rupture de la prise en charge pour les personnes qui sont prises en charge comme cela“. (l’intervention du ministre de la Santé sur le cannabis thérapeutique est à écouter à partir de la 19ème minute de l’interview)
Pour Hugues Peribère, PDG d’Overseed, tous les feux étaient pourtant au vert pour que les produits à base de cannabinoïdes puissent bénéficier d’une AMM (Autorisation de Mise sur le Marché) “Nous avons une expérimentation qui a été menée de concert avec les pouvoirs publiques, et très bien menée à ce jour” estimait pour Zeweed le fondateur de l’entreprise Orléanaise de cannabis thérapeutique.
Pour le professeur Nicolas Authier, qui regrette que d’autres ministères que celui de la Santé aient été consultés, ce n’est pas pour autant la mise à mort du cannabis thérapeutique en France “Ce statut ad hoc est pratiqué chez nos voisins européens qui ont légalisé le cannabis thérapeutique, sans pour autant qu’il y ait d’AMM de leur coté. Nous pouvons donc imaginer, dans le meilleur des scénarios possibles, que l’Etat mette en place un système de prescription et distribution sur un régime particulier à l’issue de l’expérimentation. Alors que 300.000 patients en échec thérapeutique pourraient bénéficier de traitements au cannabis encadrés, je souhaite encore croire que les quelques 5 ans de travaux (dont deux années d’études préliminaires NDLR) que nous avons faits leur profiteront très bientôt”.