Syndrôme cannabinoïde: quand l’abus de THC se paie trop cher le lendemain

//

Avec la légalisation du cannabis, les cas de “syndrôme cannabinoïde” ont explosé aux Etats-Unis. Alors que les hôpitaux US voient affluer aux urgences des consommateurs en proie à l’affection, Zeweed fait le point sur cette gueule de bois de l’herbe, conséquence directe d’un marché débridé où des entrepreneurs peu scrupuleux proposent des produits toujours plus forts en THC.

Depuis quatre ou cinq ans, le matin, j’avais assez systématiquement une légère nausée latente, une petite heure après le réveil” témoigne Vincent*, 43 ans. “Dès que je me mettais à lire ou regardais mon écran trop près, c’était vertiges, hypersalivation et une franche envie de vomir. En général, vers midi-une heure, ça passait.” explique ce dessinateur projeteur en architecture et gros consommateurs de cannabis” Il y a eu des jours où j’étais carrément incapable de travailler le matin, alors je rattrapais le temps perdu le soir” poursuit Vincent, qui ne boit pas d’alcool, ne se drogue pas, mais fume de l’herbe depuis ses 18 ans. “Au début je pensais que j’avais un problème oculaire et je suis allé voir un ophtalmologiste qui n’a rien trouvé. Mon médecin traitant n’a à ce moment-là rien trouvé non plus au niveau gastrique ni quoi que ce soit d’anormal après un bilan sanguin complet. Puis, en juillet dernier, je suis parti en croisière en Grèce et ça a été régime sec question weed. Au bout de quatre jours, plus de tête qui tourne, plus de nausées alors que je m’attendais à avoir le mal de mer!” s’amuse-t-il.

Nausées, crampes et douches chaudes

Ca ne m’a pas pris longtemps pour comprendre d’où venait le problème, ou tout du moins  faire un lien de cause à effet. Une fois revenu à terre, j’ai cherché confirmation sur le Web et en ai parlé à mon médecin qui lui aussi s’est renseigné: j’avais tout les signes du syndrome cannabinoïde, symptômes qui ont disparu en mer avec l’abstinence. Depuis, je me suis mis au CBD et à la weed beaucoup plus légère alors qu’avant je faisais la course à la beuh la plus dosée. Si je n’avais pas fait moi-même le rapprochement, je serais encore à fumer ma GG4 ou ma Gelato (deux variétés à plus de 20% de THC NDLR) et à passer des grands moment de solitude après chaque réveil“.
Vincent a de la chance dans son malheur: en n’habitant pas dans un pays ayant légalisé où l’on peut acheter des concentrés (Dabs) à 80-90% de THC, il aura limité les dégâts engendrés par l’absorption régulière d’une trop grande quantité de THC et se sera épargné un passage par la case hospitalisation.

Aussi connu sous la dénomination “syndrome d’hyperémèse cannabinoïde”, le syndrome cannabinoïde (SC) se caractérise cliniquement par l’association de douleurs abdominales, de nausées et de vomissements consécutifs à une consommation chronique/quotidienne de cannabis. Un syndrome qui peut être difficile à diagnostiquer pour le praticien qui a en face de lui un sujet en bonne santé qui est loin de se douter que c’est la weed de la veille qui l’amène aux urgences. Autre donnée connue: le SC est plus fréquent chez les adultes de moins de 50 ans qui consomment du cannabis de façon soutenue. Pour une raison inexpliquée, le SC ne semble pas toucher les stoners de la première heure. Enfin, dénominateur commun à tous les patients admis aux urgence: la consommation régulière de produits à haute teneur en THC (fleurs, Dabs, vape-pen, edibles…).

La légalisation sauvage en cause

Les crises peuvent durer jusqu’à 48 heures et se répéter tous les mois si la consommation de cannabis est poursuivie avec la même intensité. Le SC évolue classiquement en trois phases, avec une première phase dite “prodromique”  d’une à deux semaines, où le sujet est pris de nausées matinales, vomissements et troubles digestifs. Elle est suivie d’une phase dite “émétique” avec vomissements intenses, persistants et douleurs abdominales pouvant durer plusieurs heures. Les douleurs abdominales peuvent alors être soulagées par des bains d’eau chaude, parfois prolongés, remède de grand-mère stoner développés par des patients qui n’osent pas toujours se rendre à l’hôpital, pour ces raisons financières ou légales. Devant l’efficacité de la pratique et l’innocuité de la plupart des médicaments conventionnels, c’est ce même traitement qui est désormais adopté en milieu hospitalier.

Si la physiopathologie du syndrome cannabinoïde reste mal connue, de même que ses facteurs de prédisposition, une chose est certaine: à doses modérés, le cannabis n’engendre pas de SC. C’est le manque d’encadrement du marché du cannabis et de fait une offre de produits beaucoup trop corsés en THC, molécule dont le taux n’a toujours pas été limité aux Etats-Unis, qui sont les grands responsables de cette inédite vague du mal de l’herbe.

*le nom a été changé.
Sources:
-Allen JJ, de Moore GM, Heddle R (2004) Cannabinoid hyperemesis: cyclical hyperemesis in association with chronic cannabis abuse. Gut 53:1566–70
-Pelissier F, Claudet I, Gandia-Mailly P, et al (2016) Cannabis hyperemesis syndrome in the emergency department: how can a specialized addiction team be useful? A pilot study. J Emerg Med 51:544–51
-Fabries P, Renard A, Puidupin A, et al (2014) Diagnostic méconnu à la douche miraculeuse. Ann Fr Med Urg 4:334–5

Ne ratez rien de l’actualité du chanvre et du CBD, inscrivez-vous à la Zeweed Newsletter!

Journaliste, peintre et musicien, Kira Moon est un homme curieux de toutes choses. Un penchant pour la découverte qui l'a emmené à travailler à Los Angeles et Londres. Revenu en France, l'oiseau à plumes bien trempées s'est posé sur la branche Zeweed en 2018. Il en est aujourd'hui le rédacteur en chef.

Previous Story

La NBA se met au vert

Next Story

Vignoble Klur : L’Air frais de l’Alsace

Latest from News