Depuis vingt-sept ans Jay-Jay Johanson surprend à chaque album par la richesse de ses mélodies, la beauté poétique de ses textes et la dimension intemporelle de son univers. ZEWEED est venu le questionner sur le processus de création, sur son ivresse artistique et sa vision du paradis.
ZEWEED : On dit que ta musique a pour point de départ le jazz. Peux-tu nous raconter ton lien avec ce genre musical ?
Jay-Jay Johanson : Je suppose que c’est grâce à mon père. Il écoutait toujours ses disques de jazz dans le salon, à la maison – le plus souvent Modern Jazz Quartet et Erroll Garner. De la chambre de mes sœurs, j’entendais ABBA et, de la chambre de mes frères, j’entendais Sweet, Slade et autre son glam rock. Ma mère aimait Elvis et Tom Jones. Nous sommes au milieu des années 1970, j’étais un hard rocker fan de Ozzy et Kiss ; clairement le plus bruyant de la famille ! Papa et certains de ses amis avaient un club de jazz et organisaient souvent des concerts. J’ai vu Gerry Mulligan, Stan Getz, mais n’accrochais pas plus que ça. En 1984, Chet Baker est venu jouer au club. J’y suis allé parce que j’aimais bien son “Funny Valentine”. Cette soirée a changé ma vie et forgé ma façon de composer.
ZEWEED : Sur ton premier album Whiskey, on découvre un esprit trip-hop. Peux-tu revenir sur l’ambiance sonore de cet album que la presse avait très justement salué comme un mélange enivrant de Chet Baker et de Portishead ?
J.J.J. : J’avais essayé de faire des titres avec un quatuor de jazz traditionnel, mais ça sonnait trop traditionnel, justement. Quand j’ai entendu le premier album de Massive Attack, de Portishead et les compositions de Mo’Wax, je me suis mis à ralentir les rythmes hip-hop sur mon 7-pouces, et à sampler des pistes sorties de ma collection de vinyles. J’avais un piano électrique Hohner et une boîte à rythme Boss ; c’est à ce moment-là que j’ai trouvé le son que je cherchais.
“Presque toute la musique que j’écoute est en quelque sorte planante”
ZEWEED : Quelles sont les compositions qui se rapprocheraient plus d’une atmosphère planante, pour ne pas dire paradisiaque ?
J.J.J. : Il y a des chansons qui comptent beaucoup, et que je ressens le besoin de jouer quand je suis sur scène. Mon premier single “It Hurts Me So” en fait partie ; “Far Away” de Poison en est un autre. “Not Time Yet” de Kings Cross et “Believe in Us” sont également importants pour moi, et je suis fier de les avoir écrits.
ZEWEED : Est-ce que tu fumes de l’herbe pour composer ?
J.J.J : Je n’ai jamais essayé l’herbe ou le hasch ? Je suis entouré de gens qui en consomment, mais moi, je me contente de boire du whisky. La réponse est donc : non.
ZEWEED . Quelle est ta vision du paradis ?
J.J.J : Le paradis… pas évident de répondre à cette question. Pour moi, les paradis terrestres, c’est plutôt le Whiskey… L’utopie sur cette planète est très difficile à atteindre dans une société fondamentalement basée sur l’argent.
ZEWEED : Ta playlist idéale à passer avec du CBD ?
J.J.J : Presque toute la musique que j’écoute est en quelque sorte planante. J’apprécie les variations électroniques comme les collections d’Aphex Twin, Brian Eno et Burial. Parfois je vais plus sur les pièces pour piano de Ryuichi Sakamoto mais je peux parfois préférer de la musique classique. Chet a absolument le même effet calmant sur moi. L’un de mes morceaux préférés est sur un disque sorti en 1977 sur un label appelé Lovely Music, Robert Ashley Private Parts. Cet album est composé de deux longs morceaux, « The Park » et « The Backyard », probablement les meilleurs morceaux de musique jamais sortis… Ces deux morceaux m’ont sauvé d’années de thérapie.