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François Michel Lambert: Vert de vert

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Le député François-Michel Lambert n’a jamais fumé un joint de sa vie. Ca ne l’aura pas empêché d’en brandir un l’Assemblée Nationale pour soutenir la légalisation du cannabis. Nous l’avons croisé à la Cannaparade où il nous a donné son 06 et rendez-vous pour une interview.

Paris, samedi 29 Mai, place de la République. J’arrive en retard à l’édition 2021 de la Cannaparade qui a déjà bien entamé son chemin vers la place de la Bastille. J’avise la situation et prend mes jambes à mon cou pour me retrouver 500 mètres plus loin au milieu d’une foule dense et nombreuse. Sous le soleil d’une belle après-midi, des jolies filles, des jeunes aux visages souriants, des quadras bobos et une fanfare de 18 musiciens sont venus demander la libération de l’herbe.

François-Michel Lambert et Eric Coquerel: en tête, on se gondole.

Nous sommes bien loin des maigres 40 punks à chiens perdus évoqués dans l’article du Parisien. En tête de cortège, je repère une silhouette familière. Grand, regard droit, chemise blanche et veste bleu-marine déboutonnée, il s’agit du député écologiste des bouches du Rhône François Michel Lambert (Libertés et Territoires). A coté de lui, un autre fervent partisan de la légalisation du cannabis: le député LFI Eric Coquerel. Deux jours plus tôt, nous avions réalisé l’interview de l’insoumis vert. Je me dis que les deux feraient bien la paire. Arrivé devant l’Opéra Bastille, j’accoste l’élu Bucco-Rhodanien pour lui demander un selfie et son numéro de téléphone. Le courant passe directement, nous nous donnons rendez-vous une semaine plus tard pour une interview.

Quel regard portez-vous sur la politique menée depuis 1970 sur la question cannabis?
Lorsqu’en 2000, je manifestais pour la légalisation du Cannabis, avec Jean-Luc Bennahmias (qui était alors secrétaire général des
Verts NDLR), le débat était placé sur un terrain sociétal et l’avait été depuis 1970. Au même titre que la lutte pour le droit à l’avortement ou contre l’homophobie, il s’agissait alors de défendre des libertés individuelles. D’ailleurs, à l’instar des homosexuels, les consommateurs de cannabis ont longtemps été considérés comme des déviants, des marginaux. Après 2000, le marché a explosé, le trafic est passé aux mains de réseaux criminels beaucoup plus organisés et la jeunesse a commencé à être fortement impactée. En quelques années, nous sommes passé d’un débat libertaire et baba-cool à un problème sanitaire et mafieux.

Ce sont pour des motifs de santé publique que l’exécutif ne veut pas entendre parler de légalisation?
Pas seulement. Il y a à mon sens, et même si ce n’est pas explicitement dit, une notion de valeurs sur lesquelles les ministres de l’Intérieur et de la Justice ne veulent pas céder. Ils ont érigé ces valeurs en postures politiques et morales, jusqu’à en faire des points de blocage.  J’ai échangé avec eux et je peux vous dire que le cannabis, ils ne veulent pas en entendre parler parce que ce n’est pas leur monde. Au fond, ils sont restés figés dans une certaine France très années 70, très manichéenne, la drogue c’est de la merde, c’est un truc de jeunes, de marginaux, il faut protéger les bonnes gens…   Mon intime conviction est qu’ils sont contre la légalisation pour des raisons personnelles plus encore que politiques. Pour eux, c’est la dernière digue à ne pas franchir, le dernier symbole d’une certaine morale, d’un monde un peu nostalgique où les dealers étaient encore invisibles…

L’argument sécuritaire est aussi mis en avant…
Si l’on va sur le terrain sécuritaire, il faut commencer par comprendre que la politique menée est une catastrophe. Nous parlons d’un million d’heures de police allouées à la lutte contre le cannabis, de drames humains et d’argent brulé pour aucun résultat. Quand on ferme un point de deal, il y en a dix autres qui s’ouvrent
dans les jours qui suivent. D’un point de vue sanitaire, c’est aussi une catastrophe puisque le consommateur se retrouve avec un produit de contrebande, donc souvent coupé ou frelaté. A cela il convient d’ajouter que la prohibition coûte 1 milliard d’euros à  l’Etat par an avec un tiers des prisonniers qui sont incarcérés pour des peines liées au cannabis.

Croyez-vous que le lobby Big Pharma, alcool et tabac pèse dans la balance?
Pour paraphraser Michel Rocard: “je suis plus certain de la connerie du monde que de sa capacité à comploter”. Donc non, je ne crois pas que le lobby en question ait une vraie influence sur la position du gouvernement. D’autre part, l’agro-alimentaire et l’industrie pharmaceutique anticipent depuis 2019 une éventuelle légalisation en Europe et s’apprêtent à toucher gros aussi en cas de fin de prohibition. Je ne pense vraiment pas que ce soit eux qui compromettent la légalisation et ne crois pas une seconde au complot.

Cette légalisation, comment la concevez-vous?
Ma proposition de loi est basée sur un principe de monopole d’Etat, à l’image par exemple de la SEITA ou de ce qui se fait au Québec avec la SQDC. Donner la gestion de la vente de cannabis à un  EPIC (établissement public à caractère industriel et commercial NDLR ) dont le but n’est pas de faire croître le
marché me paraît essentiel. Certains partisans de la légalisation  voudraient un marché du cannabis complètement libre, ouvert à tous à l’image du maraîcher
qui va vendre ses pois-chiches. Je ne crois pas que ce soit une approche responsable en matière de santé publique. Au même titre que le tabac, l’alcool ou le sucre, le cannabis reste une drogue qui peut générer des addictions et des comportements à risque.  Il ne faut pas encourager sa consommation en tous cas si elle n’est pas responsable et maitrisée. Cela ne veut pas dire qu’une offre d’Etat serait non-compétitive et monotone : la SEITA nous a démontré le contraire.

Sondage IFOP-JDD: 54% des Français disent oui à la légalisation

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54% des Français sont favorables à la légalisation du cannabis, nous apprend un sondage IFOP pour le Journal du Dimanche. Pour la première fois, un grand quotidien national confirme en caractères gras ce que les Français souhaitent tout bas. Ce désaveu chiffré de la politique repressive menée depuis 1970 dans l’hexagone vient en écho de la Consultation Citoyenne sur le Cannabis Récréatif et aux voix d’élus qui veulent en finir avec la prohibition de l’herbe. A quand le référendum?

Dans son édition d’aujourd’hui dimanche 25 avril, le journal du Dimanche nous fait part d’un chiffre sans équivoque: 54% des Français seraient pour une légalisation contrôlée du cannabis récréatif. Par légalisation contrôlée, entendre une vente et distribution du cannabis faites dans les mêmes conditions que l’alcool ou le tabac. Soit un produit contrôlé, validé par les autorités sanitaires et interdit de vente au mineurs.
Si le résultat du sondage ne surprend que peu au regard de l’évolution du sujet cannabis dans nos société,  alors que de plus en plus de pays ont dépénalisé*, légalisé** ou s’apprêtent à le faire***, il confirme la volonté des français d’en finir avec une politique repressive d’un autre siècle.

Quand le gouvernement joue au gaulois réfractaire

Cette volonté de changer de politique,  les Français l’avaient par ailleurs exprimé il y a deux mois lors de la consultation citoyenne sur le cannabis récréatif. A ce souhait d’ouverture, le gouvernement a répondu par un durcissement des contrôles pour possessions de cannabis: depuis le mois de mars, quelque 21 000 amendes délictuelles à 200 euros ont été infligés aux fumeurs d’herbe.
Contre cette ligne dure aux airs de gaulois réfractaire sur laquelle campe l’exécutif, plusieurs voix d’élus s’élèvent tant il y a urgence d’aller de l’avant.
Aller de l’avant pour ne pas se faire couper sous l’Herbe sous le pied et priver le pays d’une manne économique considérable, sur laquelle d’autres membre de la Communauté Européenne ont déjà commencé de miser. Pour rappel, la France dispose de toutes les structures agricoles ainsi que d’un climat idéale pour redevenir le leader de la production de chanvre qu’elle était historiquement. Aller de l’avant aussi pour ne pas ajouter une crise sanitaire à une autre, tant il y a urgence aussi  de trouver des solution aux ravages du cannabis chez les jeunes et très jeunes, conséquence directe de la prohibition et du marché noir.

En marche vers les élections

Du maire LR de Reims Arnaud Robinet au député LEF des bouches du Rhône François-Michel Lambert en passant par la sénateur LR Robin Réda ou la députée LREM Caroline Janvier, (qui vient d’exprimer sa volonté d’en finir avec l’interdit cannabique dans les colonnes du mensuel Technikart), ce sont des représentants de tous horizons politiques qui demandent, si ce n’est la légalisation, au moins un vrai débat sur la question et/ou un référendum.Vert voeu pieux ou enfumage politique? Toujours est-il que le Président Macron annonçait dimanche dernier dans les colonnes du Figaro “souhaite(r) un grand débat sur les drogues“.
L’avenir nous dira rapidement s’il s’agit d’une véritable ouverture ou si l’Elysée fait (encore?) marcher les Français.

*35 pays ont dépénalisé l’usage du Cannabis. Parmi eux: l’Espagne, le Portugal, la Suisse, Le Luxembourg, la République Tchèque, la Suisse, les Pays-Bas, le Danemark, la Croatie, l’Autriche, la Lituanie, la Lettonie, l’Italie, la Grèce, la Bulgarie, la Belgique, le Mexique, le Brésil ou l’Argentine.
** L’Uruguay, L’Afrique du Sud, Le Canada et 15 états Américains (16 avec Washington DC) ont légalisé l’usage du cannabis récréatif
*** La Suisse, Le Luxembourg, le Mexique, l’Australie et le Maroc devraient rejoindre les pays libérés avant la fin de l’année.

Tribune: La Morning Routine du Révolutionnaire

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Le révolutionnaire a lui aussi sa morning routine, ses petites habitudes reconnaissables qui le rendent humain et accessible. S’il ne commence pas sa journée en sirotant un champagne gourmant (une coupe de Blanc de Blanc et deux traits de blanche neige) il doit bien trouver quelque part l’énergie d’éclater le régime établi. À la fois simple et essentiel, il est finalement le rejeton de son siècle, ce John le Conquérant…

Réveil 8h30. On ne saurait se lever avant Lord Soleil. Assis au bord de son lit, le révolutionnaire se gratte les yeux en pensant à tout le mal qu’on lui fait. Oh Marie, si tu savais… Après un café bien mérité et une claque sur les fesses de l’oreiller, il se dirige, princier, vers la douche qui lavera ses péchés d’hier et lui fera le poil luisant. Parce que nous ne sommes pas tous des sauvages, n’en déplaise à Robespierre. Alors assis sous le flot incessant de l’eau chaude et souffrant la volupté rythmée et discrète d’un gel douche Bio sans savon au Ph neutre, il refait son monde.

 Il soigne ses longs cheveux, apanage indispensable de tout révolté, avec l’attention et la tendresse d’un homme pour ses chien. En l’occurence deux golden retriver qu’il siffle en aboyant leurs noms: Karl et Max. Véritable Samson des temps modernes, il ne sort pas de chez lui sans avoir peaufiné sa crinière. Cette toison, signe extérieur de richesse capillaire a  toujours été pour lui symbole de liberté. Voire d’insolence, comme une petite pique en bouclette à ces normes irritantes. Un petit pas pileux  pour la cause contestataire,  un grand pas pour celle du hair conditionner.

Une fois sorti de la douche, il observe dans le miroir le reflet de l’homme révolté. Pas mal pour un mardi… On se brosse les dents, on vogue un peu sur les réseaux assis sur un trône de fortune en récitant sa prière matinale « café, clope c… » avant de se tartiner de crème au CBD. A défaut de balancer sur les porcs, on s’hydrate les siens, de pores.

Tout beau, tout propre, il ouvre la fenêtre et déguste son deuxième café. Il ne faudrait pas manquer de caféine tant la semaine s’annonce sportive (il paraît que Macron va reconfiner) … Il allume la radio, histoire de se tendre les nerfs, juste le temps d’écouter les spécialistes lui démontrer par A+B qu’il n’est pas essentiel et qu’il ferait mieux de rester chez lui à regarder BFMTV, une main droite dans le froc et la gauche sur la télécommande. N’est pas un héros moderne et révolutionnaire qui veut. Il leur remplirait bien le bide d’essence frelatée,  à ces spécialistes cathodisées… mais chaque chose en son temps: d’abord un petit pet’ de CBD.

Nul besoin visiblement d’être un trou du cul pour sortir de la merde: encore une annonce débile du gouvernement en boucle à la télé. J’en connais un qui va pouvoir se tailler sa réélection en pointe. Allez, c’est l’heure d’aller gueuler, ceux qui vont sourire vous saluent.
Toutes mes plus sincères.
Signé de ceux que l’on entend jamais mais qui ont tout perdu.

Mexique : Bientôt la légalisation ?

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Des législateurs mexicains vont être appelés avant la fin 2020 afin de dépénaliser le cannabis. 

Un groupe de militants opiniâtres qui prône la légalisation de l’herbe s’est installé depuis février sous les fenêtres du Sénat à Mexico, donnant quelques couleurs à ce lieu austère.

Pour mieux convaincre les occupants du bâtiment, ils en ont planté près de l’une des entrées. La pluie et la chaleur aidant, les pousses atteignent 2 m de haut.

«Nous revendiquons d’abord nos droits en tant que consommateurs responsables, avant de penser aux intérêts du marché», explique à l’AFP Enrique Espinoza, 30 ans, membre du Mouvement Cannabique Mexicain.

Une vingtaine de jeunes veillent sur les plants tout en s’adonnant à la cuisine et à la fabrique de produits à base de chanvre, en musique.

La règle en vigueur ici est de ne pas toucher aux plantes pour les fumer. Elles se veulent un symbole de la lutte pour la dépénalisation. Chacun apporte donc ses joints.

Non à l’extorsion

Au Mexique, la consommation de marijuana à des fins récréatives est autorisée depuis 2015, mais pas sa vente.

En outre, chaque personne n’a le droit d’en posséder sur elle que cinq grammes, ce qui n’est pas toujours commode à vérifier lors d’une inspection de police.

«Nous en avons assez de l’extorsion des policiers qui nous imposent des amendes pour nous laisser passer», tempête Enrique Espinoza.

Les tentatives afin d’augmenter la dose minimale de cinq grammes ont jusque-là échoué au Congrès, mais la justice a fixé au 15 décembre la limite pour légiférer.

Entre-temps, la plante a d’ores et déjà été retirée de la liste des «médicaments absolument interdits», en permettant ainsi la consommation à des fins thérapeutiques.

Nicolas Guerra, 23 ans, coursier, défend avec ardeur les propriétés médicinales du cannabis. Il en fume depuis quatre ans pour surmonter une névrose.

«La marijuana et les arts martiaux m’ont aidé à diminuer ma névrose. C’est mon médicament et c’est la raison pour laquelle je suis favorable à sa légalisation», raconte-t-il.

Depuis l’installation de la plantation, une douzaine de sénateurs se sont déjà présentés pour s’adresser aux militants.

«On leur a dit de ne pas se comporter comme des moutons», lance Enrique Espinoza.

Un remède contre la violence?

Pour la cinquantaine d’organisations qui militent pour la libre consommation de cannabis au Mexique, la loi à adopter devra autoriser la «possession simple et suffisante» d’herbe, que les usagers ne soient pas répertoriés, que la consommation soit libre dans des espaces adéquats et que l’exploitation de la plante toute entière soit accessible.

Si elle est adoptée, le Mexique ira dans le sillage de l’Uruguay, qui a adopté en 2013 une loi autorisant la vente en pharmacie de marijuana provenant de plantations privées sous contrôle de l’État, en plus des cultures domestiques et coopératives.

Les autorités uruguayennes souhaitaient rogner sur le marché des trafiquants, un objectif qui a été atteint puisque la consommation de marijuana fabriquée illégalement a été divisée par cinq entre 2014 et 2018, selon les chiffres officiels.

Le Mexique, où la marijuana est la drogue la plus couramment saisie avec 185 tonnes cette année, souffre de la violence liée au trafic, qui est stimulé par sa proximité avec les États-Unis, principal consommateur de stupéfiants.

Depuis 2006, lorsque le gouvernement mexicain a militarisé la lutte contre les cartels, 296 000 meurtres ont été enregistrés.

Le président de gauche Andres Manuel Lopez Obrador, qui attribue la plupart des meurtres au crime organisé, a déclaré à plusieurs reprises son intention de légaliser certaines drogues dans le cadre de sa politique sécuritaire.

En attendant que les législateurs mexicains se prononcent, Céleste, 27 ans, livreuse de profession, estime que le «jardin» de cannabis au pied du Sénat est un «bastion» de liberté.

«Pourquoi devrions-nous nous cacher?», dit-elle, le visage noyé dans ses volutes de fumée.

 

Zeweed avec AFP