Et si la Covid-19 emportait le pétrole?

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La crise sanitaire a considérablement affaibli les compagnies pétrolières. Aiguillonnés par les progrès techniques et la peur du risque climatique, les investisseurs sont tentés de miser sur les alternatives à l’or noir. Une première.

Et si le « monde d’après » se jouait sans pétrole ? Question aussi saugrenue que celle de la nationalisation de la vente de weed. Et pourtant. L’or noir a mal supporté la pandémie de Covid-19. Et nul ne sait s’il s’en remettra. Tout commence, en mars, par le refus des pétroliers saoudiens et russes de diminuer leur production, alors que la demande mondiale plongeait, confinement oblige. Le résultat ne s’est pas fait attendre : les cours ont chuté vertigineusement. Dans le sud des États-Unis (où les stocks étaient archipleins), on a vu des prix négatifs. Inédit en 150 ans d’histoire pétrolière!

Production à perte

Les cours se sont rétablis aux alentours de 35 $/baril, ce qui est très inférieur au coût de production du pétrole de schiste américain. Or, ces bruts non conventionnels représentent les deux tiers de la production US. Amis de Donald Trump, les pétroliers texans produisent à perte. Les faillites s’enchaînent et les banques héritent de puits de pétrole dont elles ne savent quoi faire.
Ailleurs, la situation n’est guère plus favorable. L’arrêt des transports terrestres, aériens, maritimes a réduit de 20% la consommation mondiale d’hydrocarbures. De quoi saigner à blanc certaines compagnies. Toutes sabrent dans les budgets d’exploration (pour trouver de nouveaux gisements) et de production. À ce rythme, avance l’agence internationale de l’énergie, les investissements pétroliers chuteront d’un tiers en un an. La perspective d’une rupture d’approvisionnement n’est pas à exclure d’ici à 2025. Il est urgent d’attendre, disent certains : Big Oil en a vu d’autres.

Un choc différent

Vrai. Mais la situation actuelle diffère sensiblement des précédents chocs pétroliers. Doucement, mais sûrement, le climat et ses drivers sont perçus comme des risques financiers par les investisseurs. Il gonfle le flot de banques, de fonds de pension et de spéculateurs qui s’interdisent de placer nos sous dans les énergies fossiles. Et parce qu’il faut réduire notre empreinte carbone, les alternatives aux produits pétroliers se multiplient.
On connaît bien sûr les agrocarburants. La fabrication des produits de première génération concurrençait la production de denrées alimentaires. Rouler ou manger, il allait falloir choisir. Heureusement, on sait désormais utiliser des plantes non alimentaires, voire les parties non comestibles des végétaux, pour produire essence, gazole et kérosène. Consommant 7% du pétrole mondial, cargos, pétroliers et porte-conteneurs pourraient aussi carburer à l’ammoniaque et à l’électricité.

La révolution hydrogène

À terre, une autre révolution énergétique s’amorce : l’hydrogène. Utilisées dans les capsules Apollo, les piles à combustible se démocratisent. Ces engins qui « transforment » l’hydrogène en électricité, en chaleur et en vapeur d’eau peuvent alimenter des moteurs électriques de toute taille : du téléphone mobile, à la locomotive, en passant par la centrale à cogénération. Vecteur énergétique prometteur, l’hydrogène (aujourd’hui produit dans les raffineries de pétrole) peut être extrait de l’eau par des énergies décarbonées : nucléaire, solaire ou éolien.
Si les transports, qui engloutissent 75% du pétrole mondial, changeaient de carburant, l’exploitation de l’or noir perdrait sa raison d’être. Signe des temps, les compagnies pétrolières européennes font évoluer leur modèle d’affaires. Total espère réaliser 20% de son chiffre d’affaires en vendant des énergies décarbonées. BP, Shell investissent lourdement dans les énergies renouvelables. L’ENI italienne veut planter des massifs forestiers qui absorberaient le CO2 généré par ses activités. Le début de la fin du pétrole ? Pas impossible. Une lecture attentive des plans de relance de l’économie permettra de répondre à cette question. Rendez-vous dès la fin de la pandémie !

Volodia Opritchnik

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Ancien militaire, passé à l’activisme écologique, Volodia arrose désormais les ennemis du climat à coup d’articles. Créateur de L’Usine à GES, première lettre francophone sur la politique et l’économie du réchauffement, Volodia partage son temps libre entre les dégustation de vins et de cigares. Deux productions qui ne renforcent pas l’effet de serre.

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