La fumée blanche pointe enfin à l’horizon. Depuis mars 2021, la France teste sous haute surveillance l’usage thérapeutique du cannabis. Deux ans plus tard, l’expérimentation menée par l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), impliquant près de 3 000 patients, touche à sa fin. Une étape décisive vient d’être franchie avec la rédaction récente des textes officiels, bientôt transmis à la Commission européenne pour validation.
Les pathologies ciblées sont lourdes et souvent réfractaires aux traitements classiques : douleurs neuropathiques sévères, certaines épilepsies, spasticités douloureuses liées à la sclérose en plaques, situations palliatives ou encore les effets secondaires pénibles des chimiothérapies. Les résultats sont déjà probants : réduction significative des douleurs et amélioration notable de la qualité de vie des patients.
« Il serait aberrant de ne pas généraliser ce traitement, vu les bénéfices observés », souligne Anne-Sophie, neurologue impliquée dans l’expérimentation et interrogée par France Inter. D’autant que, selon plusieurs médecins, le cannabis thérapeutique permettrait aussi de réduire la consommation d’opioïdes, offrant une alternative précieuse aux traitements conventionnels.
L’avenir du cannabis thérapeutique entre les mains de la HAS
Toutefois, avant une généralisation effective, un dernier obstacle reste à franchir : l’avis de la Haute Autorité de Santé (HAS). Sollicitée récemment par le ministre de la Santé, elle doit prochainement évaluer l’intérêt thérapeutique précis du cannabis médical. Sa décision, attendue dans les prochains mois, sera cruciale pour l’avenir de milliers de patients en attente d’un soulagement efficace.
En attendant cet ultime feu vert, les autorités sanitaires françaises s’affairent déjà à poser les bases nécessaires à une généralisation maîtrisée : élaboration des modalités de prescription, formation des professionnels de santé et organisation d’une filière nationale sécurisée pour la production et la distribution du cannabis médical. Un dispositif qui devra être étanche afin d’éviter toute dérive vers un usage récréatif incontrôlé.
« Cheval de Troie » de la légalisation pour la droite
Pour autant, le débat est loin d’être clos. Certaines voix politiques conservatrices continuent de s’élever contre cette évolution, dénonçant un risque de banalisation du cannabis. « C’est un cheval de Troie vers une légalisation complète », s’inquiète le sénateur LR Patrick Duval.Pourtant, le recul à l’étranger est largement rassurant. Au Canada, en Allemagne, en Israël ou aux États-Unis, où le cannabis médical est courant depuis des années, aucun cataclysme social ou sanitaire n’est venu troubler les systèmes de santé. « Nous avons suffisamment d’éléments pour éviter les pièges », assure au micro de la première chaine radio de France Laurence Baudin, sociologue spécialiste des politiques de santé.
Reste désormais à franchir ce dernier obstacle réglementaire. Si la France réussit à dépasser ses résistances historiques, le cannabis thérapeutique pourrait enfin apporter une réponse concrète et durable aux patients souffrant de douleurs chroniques. Un soulagement médical plutôt qu’un fantasme récréatif.