France

“Cannabis”, l’enquête qui pose les bonnes questions

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Le 2 avril prochain, au lendemain de la légalisation du cannabis en Allemagne, France 5 diffusera en prime time « Cannabis », un documentaire réalisé par Antoine Robin et présenté par Mathieu Kassovitz.  ZEWEED a pu voir en exclusivité cette enquête choc, dont nous vous livrons ici les grandes lignes.

Alors que le trafic de cannabis est au cœur de l’actualité avec les opérations  « Place Nette », la chaîne du service public France 5 (France télévisions) a choisi de diffuser un documentaire qui interroge sérieusement le bien-fondé de la politique menée par son employeur.

Mathieu Kassovitz est allé questionner addictologues, dealers, consommateurs, politiques et forces de l’ordre, pour dresser un état des lieux de 50 ans de prohibition en France, à ce jour la plus sévère d’Europe. Paradoxe : l’Hexagone est le pays qui compte le plus grand nombre de fumeurs de joints, avec près de 6 millions d’enthousiastes de l’herbe qui fait planer.

L’enquête se poursuit dans les pays où le cannabis est déjà légalisé ou dépénalisé : au Maroc, en Espagne, au Pays-Bas et enfin au Canada, qui a entièrement légalisé en 2018, et où le réalisateur de La Haine a rencontré son premier ministre, Justin Trudeau.

Ce 90 minutes libre arbitre, sans préjugés “pour ou contre la légalisation” se veut une invitation à ouvrir le débat sur cette question de société qui fait régulièrement les grands titres de la presse comme des journaux télévisés.

« Mon but n’est pas qu’on légalise le cannabis mais qu’on se pose la question» précisait à cet effet Mathieu Kassovitz à l’occasion d’une interview accordée à nos confrères de 20 minutes.

Il ne fait aucun doute que “Cannabis” pose les bonnes questions. Reste à savoir si elles seront entendues et quelles réponses y seront apportées.

Cannabis – Une enquête de Mathieu Kassovitz et Antoine Robin d’Antoine Robin sera diffusé mardi 2 avril à 21.05 sur France 5, et sera suivi d’un débat sur cette très actuelle question de société
France Télévisions proposera également  une version longue de cette enquête,  dans un format découpé (soit 10 épisodes de 20 minutes), disponibles dès le mardi 2 avril, sur la plateforme web France.tv.

Quand la France chantait le chanvre

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Autre temps, autre mœurs ! Pendant des siècles et jusqu’à sa prohibition mondiale en 1961, le cannabis était librement cultivé en France. Utilisé pour tisser cordes et voiles ainsi que la fabrication de nos habits -du lange pour bébé au linceul-, le chanvre était partout. En mémoire de cet âge d’or et en attendant le retour de la belle plante dans notre vie quotidienne, Zeweed a retrouvé trois hymnes d’antan célébrant son usage.

La Chanson du Chanvre de Louise Michel (1830-1905).
Composé en 1886 par d’une des figures majeures de la Commune de Paris, ce chant de révolte rappelle l’utilisation du chanvre en tant que matière première et revenu de base d’autrefois

La chanson du rouet (1857).
Le texte est de Charles-Marie Leconte de Lisle (1818-1894), célèbre auteur de La Marseillaise, qui passa une grande partie de sa jeunesse en Bretagne, près de Dinan, où les rouets filaient le chanvre nécessaire à la confection des voiles et cordages des navires. Pendant trois siècles, du XVIème au XIXème,  la Bretagne en exporta dans le monde entier, faisant la fortune de cette région.

« Ô mon cher rouet, ma blanche bobine,
Je vous aime mieux que l’or et l’argent !
Vous me donnez tout, lait, beurre et farine,
Et le gai logis, et le vêtement.
Ô mon cher rouet, ma blanche bobine,

Vous chantez dès l’aube avec les oiseaux;
Eté comme hiver, chanvre ou laine fine, 
Par vous, jusqu’au soir, charge les fuseaux.”

A l’origine, la musique était de Georges Bizet. Quarante ans plus tard, Maurice Ravel composera sa propre version, ici interprétée par Jessye Norman:

Il existe aussi des adaptations plus rurales à partir du texte original à l’instar de cette interprétation:

La route du chanvre, de Pierre Dac (1941)
Cette chanson a été composée pendant la seconde guerre mondiale par le célèbre comédien-humoriste Pierre Dac (futur partenaire de Francis Blanche), pendant son incarcération en 1941 à la Carcel Modelo, prison modèle de Barcelone. Libéré en 1943 contre quelques sacs de blé et des fûts d’essence négociés entre Espagnols et Britanniques grâce à la Croix-Rouge française, Pierre Dac rejoindra finalement Londres où ce chant de résistance fut enregistré et diffusé en direct à la BBC. Il faut rappeler qu’avant l’arrivée des fibres synthétiques dans les années 1950-60, le chanvre (cannabis sativa) était communément considéré comme la plus solide des fibres végétales, la référence absolue pour la confection des cordes et notamment celle du gibet, pour pendre les traitres où les ennemis. Extraits :

« Amis, chantons avec ferveur,
Le chanvre purificateur.
Pour faire justice prompte,
Le chanvre aura, par ma foi,
Dans le règlement de compte,
Une place de premier choix.

Holà ! Les Laval et consorts,
Voilà ce que s’ra votre sort,
Et cependant, à tout prendre,
Vous êtes tombés si bas,
Que la corde qui va vous pendre
Vous ne la valez même pas.

Regardez bien, mauvais larrons,
Le beau chanvre que nous tressons,
Venez, venez à la ronde,
Sans bousculade, approchez,
Il y en aura pour tout l’monde,
C’est l’moment d’en profiter ! »

 

Vivre dans une maison en chanvre.

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Ecologique, économique et local, le chanvre est un composant idéal dans l’élaboration d’une habitation. Enquête sur ces nouveaux matériaux qui construisent les maisons de demain.

Qu’on se le dise : construire des habitations déconstruit l’éco-système de la planète. En effet, 8% des émissions de carbone proviennent directement de la production de ciment. Dans le cadre de la transition énergétique, la rénovation des logements français est donc devenue une priorité pour le gouvernement (isolation des combles, des murs intérieurs et planchers, nouvelles obligations d’isolation thermique en copropriété). L’aide de l’État « MaPrimeRénov », lancée en janvier 2020, a déjà été perçue par 125 000 ménages.
L’objectif fixé par la loi prévoit de son coté  100 % de bâtiments basse consommation en France d’ici 2050. La future réglementation RE2020 valorisera ainsi les bilans carbone positifs, et donc les solutions biosourcées issues de cultures locales, l’économie circulaire se conjuguant avec

Le chanvre, champion toutes catégories du stockage de CO2

Le béton de chanvre, mortier plus léger que le ciment, a cette particularité de capter le CO2 là où les autres matériaux de construction en émettent. Composé de chènevotte (partie centrale boisée de la tige du chanvre,) ce mortier vert peut servir à isoler des cloisons comme à ériger des murs. Il suffit simplement de verser ou de « floquer » ce mortier dans une ossature en bois ou en contre-plaqué (moulage).
Cet éco-matériau s’adapte à toutes les formes de projets architecturaux et est pourvu de qualités d’élasticité naturelles qui empêchent la formation de fissures, de condensation ou l’accumulation d’humidité, tout en régulant l’hygrométrie de l’air ambiant (en toutes saisons).

Une matière eco-responsable et ultra-compétitive

Pour répondre à ces enjeux écologiques, les ciments Vicat ont mis au point un matériaux aggloméré composé à 85% de chanvre.
Les parpaings végétaux élaborés par la société française sont élaborés avec des plantes cultivées dans la Haute-Seine.
Deux gammes sont proposées: une adaptée à la construction et l’autre à la rénovation. Toutes les deux offrent le même avantage alors que nous élaborons les habitations de demain: celui d’être composé d’une matière première on ne peut plus green.
Cette initiative 100% made in France a d’ailleurs conquis la ministre chargée de la transition écologique Barbara Pompili, qui a offert un chèque d’encouragement de 100 000€ à l’entreprise grenobloise dans le cadre du plan d’aide à la même transition écologique.

Non toxique, le chanvre remplace avantageusement la laine de verre ou l’amiante, résiste au feu (jusqu’à 300 degrés) et n’absorbe la température extérieure qu’au bout de 10 heures (contre 6 heures pour les autres matières). Les greniers peuvent ainsi rester frais l’été. Cerise sur le parpaing: l’utilisation d’une climatisation est inutile dans une maison isolée en chanvre. Une excellente nouvelles alors que les étés sont de plus en plus caniculaires.

 

 

Ces cordes de chanvre qui ont changé l’histoire

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Avant l’arrivée des matières synthétiques dans les années 1950-60, les fibres textiles issues de la tige du cannabis sativa étaient universellement reconnues comme étant les plus solides et les plus résistantes au sel et à l’humidité, faisant de la plante une denrée stratégique majeure.

Durant des siècles, le chanvre était une matière première indispensable pour les marines de guerre (la norme pour la confection des cordes et voiles), servant aussi également aux armées de terre pour actionner diverses machines ou engins offensifs (catapultes, balistes, frondes, arcs, arbalètes, échelles de cordes, etc.). Voici quelques exemples illustrant ces hauts faits imputables à notre matière première préférée.

 La guerre de cent ans (de 1337 à 1453)

Lors de cet interminable conflit, les archers gallois recrutés par l’armée anglaise massacrèrent régulièrement la noble cavalerie française à l’aide de leurs célèbres grands arcs en bois d’if, hauts de deux mètres, appelés « Longbow ». La corde permettant de les actionner était spécifiquement tissée en chanvre, quelquefois en soie, cirée pour être imperméabilisée contre la pluie, son coût de fabrication comptait pour la moitié du coût total de l’arc. Une certaine force était nécessaire pour subir la pression de 50kg exercée par la corde tendue, et pour être capable de tirer une dizaine de flèches par minute jusqu’à 300 m de distance.

Cette arme se révèlera particulièrement décisive lors de la bataille de Crécy (le 26 août 1346), opposant 40 000 français aux 15 000 anglais d’Edouard III, dont 6000 archers gallois. Ceux-ci décochèrent 50 000 flèches par minute sur l’armée de Philippe VI qui ne disposait, en réponse, que de mercenaires arbalétriers génois utilisant des cordes en cheveux et crin, sans force et sans précision quand elles étaient humides, alors que les cordes rustiques en chanvre des Longbbows gagnaient en dureté une fois mouillées. La fine fleur de la chevalerie française y fut ainsi allègrement décimée, dans un terrible fracas nimbé de pluies d’orage.

Archers anglais lançant leurs flèches en chargeant des chevaliers français à la bataille de Poitiers (Bibliothèque nationale d’Autriche/AKG-Images)

Le personnage de Robin des Bois, mythique archer anglais équipé de son Longbow, est un symbole romanesque de la révolte des paysans contre la noblesse anglaise en 1381. C’est par peur d’un tel soulèvement armé en France, que sous Charles VI, la noblesse obtint la suppression de la formation des archers ce qui valut aux Français d’être à nouveau surclassés à la bataille d’Azincourt en 1415.

La bataille de Fleurus (1794)

Le 26 juin 1794, le destin de la toute jeune république française ne tenait plus qu’a un fil : lors de la bataille décisive de Fleurus (Belgique), un cordage de chanvre actionné par 64 français, guidait, en effet, le tout premier ballon d’observation militaire du monde, pour épier et déjouer le dispositif des armées coalisées (Angleterre, Autriche, Pays-Bas, Hanovre) s’apprêtant à envahir la France, victime du chaos de la révolution.

Ce ballon captif à hydrogène nommé « L’Entreprenant », placé sous le commandement de son inventeur, le chimiste Coutelle, permettait d’observer jusqu’à 29 km, une avance de troupe d’au moins une journée de marche. Les observations étaient glissées jusqu’au sol le long d’un câble dans un petit sac en cuir. La vue de l’aéronef terrorisait l’ennemi nota Coutelle dans ses mémoires : « L’effet moral produit dans le camp autrichien par ce spectacle si nouveau fut immense ; il frappa surtout les chefs qui ne tardèrent pas à s’apercevoir que leurs soldats croyaient avoir affaire à des sorciers ». Finalement, les Autrichiens levèrent le camp, les Anglais retraversèrent la Manche le jour même, et le ballon fut tiré « comme un toutou au bout de sa laisse » sur 45 kilomètres, pour aider à reprendre les villes de Bruxelles et d’Anvers. C’était le tout début de la guerre aérienne et la France sera sauvée de l’invasion.

L’Entreprenant, ballon monté par Coutelle, lors de la bataille de Fleurus en 1794 (« Collection Tissandier », Library of Congress, Washington).

Bohémond et la prise d’Antioche

Voici comment, par une nuit de mai 1098, Bohémond de Tarente, prince normand du diocèse de Coutances et chef de l’armée des Francs de la première croisade, escalada le premier le mur d’Antioche (située de nos jours en Turquie), afin de prendre le contrôle de la ville fortifiée, après huit mois de siège : « Il tenoit en ses mains une eschiele de cordes de chanvre mout soutilment fete [faite avec art]. » (Guillaume de Tyr, Historia rerum in partibus transmarinis gestarum, chapitre 21, récit du 12ème siècle). L’extrémité inférieure de cette échelle de chanvre envoyée par Firouz, un garde arménien qui dirigeait la tour des Deux Sœurs, était garnie de crochets ferrés pour la fixer, tandis que la partie supérieure devait être fortement attachée sur le revêtement des remparts.

Photo : dessin original de Gustave Doré : Bohémond et ses troupes escaladant les défenses d’Antioche, paru dans Histoire des croisades, de J. Michaud, (Paris, 1877, vol. 1, planche p. 82).

Le débarquement des Alliés en Normandie (1944)

Lors du débarquement allié de Normandie, le 6 juin 1944, les rangers américains commandés par le lieutenant-colonel James E. Rudder, sont parvenus à escalader la falaise de la pointe du Hoc, grâce à leurs échelles de cordes de chanvre, fixées à l’aide de quelques grappins.

Cette action a été déterminante, pour finir de neutraliser l’artillerie lourde allemande, qui pilonnait l’arrivée des alliés sur les plages de Utah Beach et de Omaha Beach.
Lors de la seconde guerre mondiale, les fibres de chanvre furent utilisées massivement pour confectionner les toiles et suspentes de parachutes, les toiles de tente, les cordages, hamacs, sacs et uniformes militaires (jusqu’aux coutures de bottes des rangers).

Photo : L’escalade de la pointe du Hoc en juin 1944 (Conseil Régional de Basse-Normandie / National Archives USA).

 

Cannabis MasterClass

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Biologiste de renommée internationale, normalien, agrégé de Sciences naturelles, professeur de physiologie cellulaire à Paris VI, président de la Société des Neurosciences, chevalier de la Légion d’Honneur, directeur de recherche au CNRS, Joël Bockaert force le respect comme l’admiration. À l’occasion de la sortie de son ouvrage Le cannabis, quelle histoire ! , nous avons pu lui poser quelques questions sur cette masterclass cannabique de 160 pages.

Que sait-on déjà des utilités médicales du cannabis ?
Nous pouvons compter quatre effets positifs confirmés du cannabis à usage médical quand il est administré à juste dose.
Déjà, ses propriétés anti-nauséeuses et anti-vomitives, salvatrices pour les patients sous chimiothérapie ou atteints du sida. Mais aussi ses propriétés antispasmodiques, efficaces pour calmer et prévenir les crises de spasmes de patients atteints par la sclérose en plaque. On peut aussi parler des propriétés antiépileptiques du CBD (pour des épilepsies résistantes aux traitements conventionnels ) et des vertus antalgiques du THC qui permettent aussi de réduire des douleurs chroniques. Il faut cependant souligner que ce sont des traitement de soulagement qui ne sont pas curatifs. Parmi les effets positifs mais à confirmer; une amélioration du sommeil, une stimulation de l’appétit et des propriétés anxiolytiques.

Et de ses effets néfastes ?
Rappelons d’abord que la quantité absorbée et la concentration en THC sont deux facteurs clefs des effets délétères du cannabis. En trente ans, la concentration en THC du cannabis issu du marché illégal est passée de 3-4 % pour l’herbe des années 90 à 25-32% pour la Skunk ou la Chem Berry. Sans parler des produits de synthèse analogues du THC (K2, Spice Black Mamma…) qui sont bien plus puissants et dangereux. Les effets délétères aigus d’une consommation excessive momentanée de THC sont les crises d’angoisse, les états oniroïdes (rêves éveillés) et les psychoses cannabiques. A cela il faut ajouter les dangers d’accidents, notamment automobiles. Les effets délétères sur le long terme peuvent être un manque de motivation, un affaiblissement de la mémoire, des déficits cognitifs, parfois le déclenchement d’une psychose endormie ou des complications cardio-vasculaires. Ces effets sont particulièrement graves chez les adolescents.

Quand on parle de CBD peut-on parler d’une ruée vers « l’or vert » ?
Il y a un marché incontestable et bientôt colossal du CBD (un des composant du cannabis non psychotrope) maintenant qu’il est légal d’en vendre et d’en consommer en Europe, avec un nombre de boutiques et de produits à base de chanvre qui ne cesse d’augmenter. Il y a visiblement une offre et une demande croissantes et des profits à faire. Mais les profits les plus faramineux, au niveau mondial, restent ceux du cannabis récréatif.

Combien de temps faudrait-il à la France pour devenir leader du marché du chanvre ?
La France a déjà régné sur le marché du chanvre à usage agro-industriel jusqu’au début du XXème siècle et en est aujourd’hui le quatrième producteur mondial. Le chanvre agro-industriel  produit en France contient moins de 0,2 % de THC. Il est utilisé légalement pour faire des vêtements, du plastique, du bio-carburant, des isolants etc… Rien ne s’oppose à ce que la France redevienne le leader mondial de ce marché en moins de 10 ans avec un produit du terroir !
Reste à développer une filière du cannabis thérapeutique (qui sera vraisemblablement légalisé en France ) et récréative… si la légalisation progressive du cannabis est décidée en France.

Pouvez-vous nous faire un état des lieux du succès ou de l’échec des politiques répressives actuelles ?
La politique répressive actuelle est un indéniable échec. Avec seulement 10% du cannabis récréatif saisi, plus de 4000 points de ventes partout en France, même si on en fermait un par jour,  il faudrait dix ans pour les supprimer tous. Nous sommes un des pays qui consomme le plus de cannabis au monde. L’alcool et le tabac -beaucoup plus dangereux pour la santé- sont en vente libre alors que la consommation ou la vente de cannabis est illégale. Cette incohérence fondamentale est une des raisons de l’échec cuisant de notre politique de répression.

Doit-on penser une légalisation du cannabis qui s’accompagne de campagnes d’information ?
Ce qu’il faut, c’est proposer un débat sans idéologie qui mettra face à face le pour et le contre d’une légalisation ainsi que des moyens d’y parvenir. Pour que ce débat existe, une campagne d’information est absolument nécessaire. Il s’agit d’analyser les effets positifs et négatifs de la légalisation.
Positifs : une vente de produits bien contrôlés notamment pour le taux de THC, la possibilité de faire des campagnes massives d’information sur les dangers d’une consommation excessive, la réduction de trafics illégaux et le dégagement de recettes fiscales.
Négatifs : légaliser une drogue est un acte problématique pour n’importe quel politique face à un cannabis illégal qui risque d’être moins cher et toujours plus fort en THC. Il faudra aussi trouver une autre ressource de revenus et d’emploi pour tous ceux qui vivent indirectement du trafic. Ce qui est le point le plus problématique. Seul un vote populaire pourrait trancher. Notons que la meilleure politique, quand il s’agit de drogues, est toujours celle qui éduque, accompagne et sollicite ses citoyens plutôt que celle qui les puni et les infantilise.

Quels seraient les effets d’une légalisation totale ou partielle sur le marché noir ?
On peut espérer qu’une partie du trafic soit supprimée. Les usagers « raisonnables » préférant acheter des produits « sûrs » et légaux. Mais il faut nuancer les choses: l’éradication totale du trafic sera très difficile et l’on ne défait pas en un jour un système qui s’est construit sur des décennies et qui rapporte beaucoup.

Qu’attendez-vous de ce livre?  Est-ce l’aboutissement d’un propos ou le début d’un débat ?
Ce livre a pour but de dresser le tableau le plus réaliste possible de l’histoire, du potentiel économique énorme du chanvre agro-industriel, du rôle socio-culturel du cannabis, de ses effets positifs et négatifs avérés afin d’organiser  un débat sérieux fondé sur des références scientifiques et des rapports publiés.

Joël BOCKAERT
Cannabis, quelle histoire!
UGA éditions
12€

L’ouvrage est disponible sur Amazon via ce lien

 

Quand les rois et empereurs de France encourageaient la culture du chanvre

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Pendant des siècles la France et le chanvre ont filé le parfait amour. En attendant que l’Etat et la plante se réconcilient, Zeweed vous invite à parcourir les plus belles déclarations d’allégeance faites au cannabis par les rois et empereurs du pays des lumières.

Charlemagne et le canava

La barbe de Charlemagne était fleurie, nous enseignent comptes et chansons. Mais fleurie de quoi? De cannabis pourquoi pas! Car l’empereur n’était pas insensible aux multiples propriétés et applications du chanvre. Dans son Capitulaire De Villis, Charlemagne invitait vivement ses sujets à la culture du chanvre (appelé alors canava), matière première essentielle à la confection de tissus, toiles, voiles et cordages. “Quid de lana, lino, vel canava ” Qu’en est-il  de la laine, du lin et du chanvre?” avait invectivé le roi des Francs.
(Capitularia de Villis vel curtis imperii, article LXII, Circa 800).

Louis XV libère le commerce du chanvre…

Près d’un millénaire plus tard, en 1720, le régent du jeune roi Louis XV, Philippe d’Orléans, publia un arrêt favorisant l’essor du cannabis agricole : « Arrêt du conseil d’état qui ordonne que le commerce du chanvre dans l’intérieur du royaume sera libre. Fait défense de le faire sortir et de l’envoyer à l’étranger et permet à la Compagnie des Indes d’établir des magasins et le prix des chanvres. » (Imprimerie royale, Paris : Arrêt du 29 décembre 1719, document F-21084-105 de la BNF).

… avant que Louis XVI et Necker n’en fassent une priorité

Peu avant la révolution française, en 1779, c’est Jacques Necker, ministre des finances de Louis XVI qui sera chargé de recenser les provinces cultivant le chanvre et d’encourager cette culture afin de ne pas dépendre d’importations pour cette matière première essentielle.  Comme aujourd’hui, les services de l’État désiraient la mise en œuvre d’une agriculture capable de rivaliser avec l’Empire de Chine ou l’Amérique.
C’est la raison de ce courrier adressé alors à tous les maires de France:
« La France est obligée, Messieurs, de tirer annuellement de l’étranger une grande quantité de chanvre, ce qui fait sortir beaucoup d’argent du Royaume. Le gouvernement, occupé plus que jamais des moyens de remèdes aux inconvénients de l’exportation du numéraire, a pensé qu’il était possible d’augmenter la culture de cette plante au point de ne plus recourir à l’étranger. Pour juger de l’augmentation dont cette production est susceptible, le Roi a déterminé de faire constater de la manière la plus précise la quantité de terrain qui est propre au chanvre dans chaque province. » (Lettre adressée au Maire Consul de Mandelieu, le 5 juin 1779 par Jacques Necker, conservée aux Archives Municipales de Mandelieu – HH1 : « Culture du chanvre », 1779).

1803 : Napoléon ordonne aux préfets de semer

Le 18 février 1803, Napoléon Ier encourageait la culture de cette plante, autrefois essentielle à la fabrication des cordages de la marine militaire : « Paris, 29 pluviôse an 9, Ordre 6585 : Faire semer en France du chanvre. Le ministre fera connaître la quantité de cette denrée qu’il peut acheter cette année. Le ministre la répartira entre les différents départements et arrondissements, en donnant ordre aux sous-préfets et préfets de la faire semer dans les communes. Ils donneront l‘assurance que ce chanvre sera acheté à un prix déterminé, rendu dans un point central désigné. Bonaparte. » (Archive de la marineCorrespondance de Napoléon Ier, publiée par ordre de l’empereur Napoléon III, Tome 8, p. 207, 1861).

A la semaine prochaine pour un nouvel épisode de l’Histoire du chanvre!

Alexis Chanebau

 

Ecrivain, historien et encyclopédie vivante de l’histoire du cannabis , Alexis Chanebau a écrit plusieurs livres sur la belle plante dont le remarquable ouvrage “Le chanvre, du rêve aux mille utilités!“, disponible sur ici sur Amazon

 

Franck Milone, pionnier du cannabis thérapeutique made in France

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Lancée en 2021, l’expérimentation du cannabis thérapeutique a été prolongée en mars de cette année.  Alors que tous les feux sont au vert, le remboursement du cannabis thérapeutique ne figure pas à cette heure sur le Plan De loi financement de la Sécurité Sociale (PLFSS). Une mauvaise nouvelle pour la filière et les 300 000 patients en attente,   qui risquent de ne pas se voir prescrire le médicament vert, à défaut d’être remboursé*. En 2022, ZEWEED avait  rencontré Franck Milone, président et fondateur de LaFleur, premier laboratoire français à avoir mis au point des traitements à base de cannabis.

Zeweed. Pouvez-vous nous décrire en quelques mots l’activité du laboratoire LaFleur ?
Franck Milone. Le laboratoire LaFleur est un laboratoire pharmaceutique français fondé en 2014 et qui est spécialisé dans le développement de médicaments à base de cannabis.
Nous avons pour vocation de développer des outils innovants pour produire de manière efficiente des produits de santé à base de cannabis au bénéfice des patients en échec thérapeutique.

Depuis quand travaillez-vous  sur l’élaboration de médicaments à base de cannabis?
On a lancé le développement du premier médicament à base de cannabis en France en 2018 avec le CNRS de Strasbourg spécialisé en oncologie: les traitements contre le cancer. 

“premiers essais cliniques chez les patients dès 2023” 

Qu’en est-il aujourd’hui ?
Il y a eu beaucoup de problématiques liées à la manipulation du cannabis et à son importation. On a tout de même réussi à importer et transformer des fleurs. Des essais ont été réalisés entre 2018 et 2021 sur des lignées de cellules cancéreuses. Actuellement, on lance les essais sur le modèle animal. Les premiers résultats sont attendus début juillet sur ce candidat-médicament. Et permettront de mettre en place les premiers essais cliniques chez les patients dès 2023. 

Combien de temps faut-il pour mettre au point et commercialiser un médicament au cannabis ?
Du développement à la mise sur le marché, il faut compter environ 8 ans. Dans notre cas, on estime la mise sur le marché du premier médicament à base de cannabis en France d’ici 2026.

Parallèlement, vous travaillez sur d’autres produits ?
Oui, on démarre un projet sur l’utilisabilité d’un dispositif médical connecté sous la forme d’un vaporisateur avec des cartouches sécurisées de granules de fleurs de cannabis. Ce dispositif médical serait adressé à une population senior. Cette étude permettrait le lancement d’un essai clinique pour évaluer l’amélioration de la qualité de vie des séniors et l’impact sur la consommation de certains médicaments.

L’intérêt est donc double : d’un coté la validation d’une nouvelle technique et de l’autre sa mise en pratique  chez les seniors…
La première étape est de valider la capacité de ce dispositif à s’adapter à l’usage d’une population sénior, et par la suite de juger du potentiel thérapeutique du cannabis sur ces populations. Il s’agit d’un de nos développements dans le cadre recherche autour du cannabis médical.

De quel oeil le corpus médical français voit-il le cannabis ?
Les mentalités ont bien évolué depuis la création en 2014. L’exemple le plus probant est celui de la mise en place de l’expérimentation qui évalue le cadre de dispensation du cannabis médical en France. Face à une demande grandissante de patients et de professionnels de santé, un constat mondiale sur la légalisation du cannabis médical et des données scientifiques prouvant l’intérêt médical dans le traitement de certaines conditions médicales, l’Agence du médicament (ANSM) a mis en place un comité scientifique transdisciplinaire pour assurer le suivi de cette expérimentation qui prévoit l’inclusion de 3000 patients, la formation de plus de 4500 professionnels de santé et autorise la dispensation de médicaments à base de cannabis pour 5 indications thérapeutiques (situation palliative, spasticité dans la sclérose en plaques, épilepsie NDLR ) conduit sur deux ans. 

La fine fleur des laboratoires de cannabis thérapeutique français à l’oeuvre.

Et côté financement, ça se passe comment?
On est la première entreprise à avoir obtenu un financement public par la BPI pour le développement d’un médicament à base de cannabis en France. On a également réalisé une levée de fonds en 2020 de 3 millions d’euros. Aujourd’hui en France, l’accès au capital reste toujours un obstacle sur la thématique. Nous sommes en capacité, à travers notre laboratoire de recherche et notre expertise de travailler sur le cannabis médical dans un cadre règlementaire, ce qui n’est pas le cas aux États-Unis. La France possède un boulevard d’innovation si elle sait le saisir. 

« La France a un boulevard d’innovation si elle sait le saisir »

La France a-t-elle les moyens de devenir un leader de la filière cannabis thérapeutique?
Tout à fait, on a la chance qu’au niveau fédéral, les États-Unis n’ont pas encore avancé sur l’enjeu médical qu’offre le cannabis, ce qui fait que les recherches biomédicales sont inexistantes. Une opportunité pour les entreprises françaises de figurer parmi les pionnières sur le sujet. Encore faut-il savoir saisir ces opportunités. On a réussi à faire une première levée de fonds en 2020, mais il faut continuer en ce sens pour la partie industrielle et la partie R&D (recherches et développements, NDLR). Profitons du climat réglementaire actuel favorable pour continuer à investir dans la recherche et développer des produits de santé français au bénéfice des patients en impasse thérapeutique. L’ANSM doit dans un avenir proche assurer une production de cannabis médical en France en apportant des spécifications techniques (critères de qualité pharmaceutique, formes pharmaceutiques, contrôle pour la culture, etc. NDLR).

Premiers médicaments 100% made in France prévus pour 2026

Justement, est-ce que vous arrivez à travailler sur une production de cannabis française actuellement ?
Sur la partie fleur de cannabis, on est encore dépendant des produits étrangers. En parallèle, on installe notre premier centre de R&D agro-pharmaceutique dans lequel on développe, optimise et standardise des procédés de production de cannabis médical, afin d’avoir des premiers lots de cannabis médical standardisé début 2023 et de proposer des produits 100 % fabriqué en France, à l’échéance de la généralisation du cannabis médical en France.

Vous proposez aussi un ensemble de service aux cultivateurs de cannabis à visée médicale…
Effectivement, au cœur de notre laboratoire de recherche nous mettons en place un ensemble de services d’une part autour de la prestation analytique pour valider les niveaux de principes actifs dans les fleurs de cannabis ou produits transformés. Et de l’autre un service autour de l’extraction de fleurs, à travers le développement de partenariats avec des agriculteurs qui depuis le décret de décembre 2021 autour de la production de fleur (dont la teneur est inférieure à 0,3% THC) peuvent valoriser la récolte de fleurs en ayant un contrat avec un laboratoire.

Les laboratoires LaFleur travaillent sur des cartouches de cannabis standardisées et sécurisées, des huiles et des gélules.

Sous quelle forme les futurs médicaments au cannabis seront-ils proposés? De la poudre, des fleurs, des gélules…?
On travaille sur différentes formes galéniques (mode d’administration, NDLR) : des granules de fleurs au travers de cartouches sécurisées à utiliser avec un dispositif médical connecté. Mais aussi des huiles qui permettent une titration précise. La prescription du cannabis médical par le professionnel de santé prévoit une augmentation progressive de la dose en suivant les conditions médicales du patient. Enfin, une fois le traitement stabilisé, des gélules peuvent être prescrites pour plus de reproductibilité et de confort d’usage. Nous proposons ces 3 formes pharmaceutiques : des cartouches de cannabis standardisées et sécurisées, des huiles et des gélules. 

En termes de variétés, pouvez- vous donner des précisions sur les types de cannabis ? Indica, sativa, variétés spécifiques?
On fait des tests sur différents types de plantes, indica ou sativa, et sur différentes variétés. Le premier objectif est d’avoir une palette d’actifs et de variétés qui soit relativement large pour avoir la capacité ensuite d’innover. On s’intéresse davantage aux formes acides des deux molécules les plus connues que sont le THC et le CBD ou sur de nouveaux actifs plus récemment découverts comme le CBG ou le CBN entre autres.

“le cannabis médical (…) doit apporter des preuves de sécurité, de tolérance et d’efficacité pour qu’il puisse s’inscrire dans un parcours de soin”

Qu’est-ce qui vous a poussé à vous lancer dans le cannabis thérapeutique?
Je me suis confronté à la réalité du système de santé à l’âge de 18 ans quand on m’a diagnostiqué une sclérose en plaques à la suite d’une crise neurologique. Face à l’incompréhension du professeur qui me suivait à l’époque et aux milliers de patients en échec thérapeutique qui se retrouvaient dans la même situation, j’ai eu envie d’innover sur la thématique du cannabis médical. Je suis donc allé à la rencontre des autorités publiques, des professionnels de santé parce que je me suis aperçu que pour faire avancer les choses, il fallait investir dans la recherche scientifique. Défendre le cannabis médical dans l’industrie pharmaceutique c’est rappeler qu’il s’agit d’un médicament qui doit apporter des preuves de sécurité, de tolérance et d’efficacité, pour qu’il puisse s’inscrire dans un parcours de soin. Ainsi, j’ai décidé de défendre le cannabis médical à travers les angles de la recherche, la formation et l’innovation. 

Vous soutenez aussi d’autres structures de la filière cannabis thérapeutique, pouvez-vous m’en dire plus ?
Je me suis notamment investi au sein de l’association de patient l’UFCM I Care (Union Francophone pour les Cannabinoïdes en Médecine) qui organise depuis 2014 des colloques scientifiques à Strasbourg et Paris pour favoriser le partage des avancées mondiales sur le cannabis médical et j’ai fondé le laboratoire pharmaceutique LaFLeur spécialisé dans le cannabis médical. Aujourd’hui nous avons un ancrage historique en région parisienne et sommes implanté à Angers, la capitale du végétal spécialisé au cœur du campus du végétal.

Propos recueillis par Julio Rémila en juin 2022

* Pour que le remboursement du cannabis thérapeutique soit inscrit au PLFSS 2024, les 300 000 patients en souffrance ont besoin de vous afin que le médicament vert ait une chance d’être pris en charge par la sécurité sociale et donc prescrit. 

Agissez pour que le cannabis à visée médicale soit enfin accessible en France en cliquant sur ce lien.

Comment Rabelais décrivait la Weed

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Rabelais, dans son oeuvre : le Tiers Livre, aborde le sujet de notre plante d’une manière riche et originale. Son récit décrit un monde fantastique, dont les éléments paraissent de prime abord chimériques et sans rapport aucun avec le réel. Pourtant, le végétal qu’il décrit ne va pas sans rappeler par de multiples aspects le chanvre ou la Weed et certains de ses effets.

À la fin du Tiers Livre, paru en 1546, Pantagruel et son compagnon Panurge achèvent la longue série de rencontres initiatiques qui rythment l’ouvrage. La question qui anime Panurge : “doit-il se marier ?”, sert de prétexte à la consultation de différents interlocuteurs souvent d’apparence invraisemblable : un philosophe, un fou, une sorcière, etc.

Or, au chapitre 59 (XLIX), Rabelais fait état d’une herbe qu’il nomme Pantagruelion : « tant verte & crue, que confite & préparée ».   « L’herbe Pantagruelion a racine petite, durette, rondelette, finissant en pointe obtuse, blanche, à peu de filaments, & pas plus profonde en terre que d’une coudée. De la racine procède une tige unique, ronde, ferulacée, verte au dehors, blanchissant au dedans : concave, comme la tige de Smyrnium, Olus atrum, Fèves, & Gentiane : ligneuse, droite, friable, crénelée, quelque peu à forme de colonnes légèrement striées : pleine de fibres, en lesquelles consiste toute la dignité de l’herbe, aussi bien dans la partie dite Mesa, c’est-à-dire médiane, que dans celle qui est dite Mylasea ».  

S’ensuit une longue description de la plante selon sa forme et sa composition : il s’agit en vérité du chanvre. Aux chapitres suivants, Rabelais décrit ses multiples usages suivant les traditions, les appellations qu’on lui donne et les peuples qui l’emploient. Il lui prête quantité de vertus miraculeuses et explique son origine :   « Ce sont d’ailleurs ces vertus et ses singularités qui la font nommer Pantagruelion. Car de même que Pantagruel a été l’Idée et l’exemple [vocabulaire platonicien] de toute joyeuse perfection (je crois que personne parmi vous autres Buveurs [c’est ainsi que Rabelais nomme ses lecteurs] n’en doute), aussi au Pantagruelion je reconnais tant de vertus, tant d’énergie, tant de perfection, tant d’effets admirables, que si elle eut été en ses qualités reconnues lorsque les arbres (selon le récit du Prophète) firent élection d’un Roi des bois pour les régir & dominer, elle sans doute eut emporté la pluralité des voix & des suffrages. Vous en dirai-je plus ? »

Ainsi le chanvre sert, selon la façon dont il est utilisé, à fabriquer des textiles, des cordes, des décorations. Rabelais fait aussi état de propriétés relaxantes similaires aux effets de ce que nous appelons aujourd’hui le CBD :« La racine de celle-ci, cuite en eau, ramollit les nerfs étirés, les jointures contractées, les podagres sclirrhotiques, & les gouttes nouées ».

Ces longues descriptions, quoiqu’insérées dans un contexte fantastique, font pourtant état des différentes méthodes qui servaient à l’époque de Rabelais à préparer et à employer le chanvre. Car, les analyses et les interprétations modernes tendent à trouver dans ses écrits comiques des sens cachés, des informations à caractère rationnel, expérimental ou philosophique.  On regrette seulement qu’il ne soit fait aucune mention des effets psychoactifs du cannabis, que Rabelais, en sa qualité de médecin, décrit pourtant grassement. Mais on découvre ici avec amusement que déjà au XVIe siècle, une certaine communauté « scientifique » se penchait avec émerveillement sur notre chère plante.

Bègles, future ville pilote d’une expérimentation de légalisation du cannabis ?

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Dimanche 4 juin, une soixantaine de personnalités, élus de différents bords politiques et associations, signaient une tribune publiée dans le Journal du Dimanche pour demander le droit d’expérimenter localement un modèle de légalisation encadrée de production, vente et consommation de cannabis récréatif. En fevrier dernier, le maire de Bègles Clément Rossignol Puech avait écrit au Président de la République pour que la ville qu’il administre soit pilote dans le cadre d’un essai de légalisation, faisant aujourd’hui de la cité Girondine   la candidate idéale pour porter une telle initative.

Selon les signataires de la tribune publiée dans le journal du Dimanche daté du 4 juin, une légalisation encadrée permettrait de contrôler la qualité des produits vendus, d’arrêter d’alimenter les économies parallèles, de désengorger les prisons et tribunaux et permettre une réduction de la consommation et de la criminalité.

Pour la soixantaine de signataires de cette tribune publiée dans le Journal du Dimanche , dont Eric Correira, infirmier et président de la communauté d’agglomération creusoise du Grand Guéret, il s’agit de “mettre l’humain au cœur de nos préoccupations”. A ce titre, “légaliser le cannabis apparaît comme la seule option pertinente, objective et rationnelle pour la France“. Alors que le nombre de consommateurs quotidiens est évalués à près de 4 millions de personnes en France, légaliser le cannabis apparaît comme une évidence pour M.Correira.

Si aucun élu creusois ne s’est encore porté volontaire pour porter localement une expérimentation de légalisation du cannabis, la ville de Bègle avait fait part en février dernier de sa volonté de faire de la cité Girondine une ville pilote dans le cadre d’une fin de prohibition du cannabis à usage adulte.

Dans un courrier rendu public vendredi 3 février, le maire de Bègles , avait en effet fait part d’une “Proposition de faire de Bègles un territoire d’expérimentation nationale pour la culture, la vente et la consommation de cannabis récréatif “.  Dans ce même courrier, l’élu soulignait également le caractère répressif et hors sol de la politique menée par l’État français à l’encontre des cultivateurs et consommateurs de cannabis.

La France est l’un des pays les plus répressifs au monde vis-à-vis des stupéfiants, avec une écrasante majorité de procès concernant de petits vendeurs de cannabis, contribuant ainsi fortement à l’engorgement des tribunaux et prisons françaises, sans incidence sur la prévalence de la consommation“, écrivait alors Clément Rossignol Puech, en ajoutant que l’État, à différentes échelles, assistait “de manière impuissante à la banalisation du cannabis chez les jeunes et à la détérioration de la sécurité dans certains quartiers en proie au trafics de stupéfiants ».

La proposition portée par l’édile écologiste de Bègles s’appuie sur les recommandations du Conseil économique et social (CESE), qui s’était prononcé le 24 janvier dernier en faveur d’une légalisation encadrée du cannabis.

Le CESE, dont l’avis n’est qu’à vocation consultative aux yeux des pouvoirs publiques, proposait ainsi que l’Etat encadre la production, la distribution et la consommation de l’herbe qui fait rire, en se basant sur les exemples des légalisations actées au Canada et à Malte, fustigeant au passage “l’échec cuisant de la politique suivie depuis cinquante ans” en France.

Une table ronde sur la légalisation du cannabis via une ville pilote sera organisée le 15 juin prochain au Centre régional de Formation de la Croix Rouge à Bègles.

 

 

Vanille “J’aime les musiques enfumées”

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En deux albums, Amazona (2019) et A part entière (2021), la fille de Julien Clerc s’est fait un prénom. A la fois grave et gaie, Vanille crée une bossa nova française, influencée autant par Françoise Sagan que par la caïpirinha. Et pour se donner confiance, elle a un secret : le CBD, naturellement.

Comment as-tu découvert le Brésil ?

Par sa musique, que j’adore. Je n’ai jamais aimé les voix trop envoyées. Alors que je cherchais comment je pourrais chanter au mieux, je me suis intéressée à l’histoire de João Gilberto. A ses débuts, il essayait d’être un chanteur pop – ça ne marchait pas. Alors il s’est mis à murmurer, et il a trouvé la voix et la voie de la bossa nova. Moi non plus, je ne mise pas sur le coffre, la démonstration vocale ; mais sur l’émotion, l’interprétation. J’ai compris ça avec João Gilberto. Et puis j’aime Françoise Sagan, dont l’œuvre me rappelle la musique brésilienne : dans les deux cas, il s’agit d’un art de la mélancolie heureuse. A la fin de ma vingtaine, je me suis dit que j’allais créer une forme de bossa nova à la française. Grâce à ma maison de disques, j’avais pu partir enregistrer mon premier album au Brésil.

Qui trouve-t-on dans ton Panthéon brésilien ?

João Gilberto par lequel j’ai eu la révélation, Caetano Veloso, Jorge Ben Jor, Seu Jorge et, pour citer une femme, Astrud Gilberto – ses interprétations à la fois naïves et profondes sont incroyables, elles me…

Retrouvez l’intégralité de cet article dans le numéro 2 du magazine ZEWEED , disponible chez votre marchand de journaux sur ce lien .

 

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