René Dumont, premier homme Vert.

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Alors qu’une vague verte a déferlé sur les municipales et que Yannick Jadot se prépare à la présidentielle de 2022, il convenait de rendre hommage à René Dumont, premier candidat écologiste à briguer la magistrature suprême. Portrait du plus rouge de tous les verts.

Né avec un siècle qu’il aura parcouru comme peu, René Dumont a grandi dans une famille de républicains laïcs militant. Une inclinaison à l’ouverture qui marquera le premier et plus tenace des écologistes français. Si les parents de René ne sont eux-mêmes pas agriculteurs, ses deux oncles et son grand-père tiennent une ferme dans le Loiret dans laquelle chaque été, il commence à s’initier aux choses de la terre.
Quand la Grande Guerre éclate, il vit à Cambrai, et le collège dans lequel sa mère enseigne est reconverti en hôpital militaire.
René parcours alors les couloirs de son école reconvertie pour y découvrir des soldats mutilés et mourants.
Cette expérience le marquera profondément : il a désormais la guerre en horreur, et ce sentiment ne le quittera jamais.
La guerre, il va la revivre à trois reprises (Seconde Guerre mondiale, Guerre d’Indochine et Guerre d’Algérie), trois conflits dans lequel ce pacifiste convaincu se retrouve entraîné alors qu’il est depuis ses 18 ans objecteur de conscience.
A la fin du conflit 39-45, l’ingénieur agronome devient conseiller agricole du gouvernement, sous de Gaule entre autre.  Il publie alors Le Problème agricole français. Esquisse d’un plan d’orientation et d’équipement (1953), ouvrage dans lequel il défend une révolution agricole productiviste, alors que l’agriculture française d’après-guerre patine.
Cette productivité à tout prix, il sera ensuite l’un des premiers à en dénoncer les dégâts, notamment alors qu’il est conseiller pour l’ONU. Nous sommes en 62.

Le Vert au verre d’eau.

 

En 1972, l’idée de présenter un candidat à l’élection présidentielle qui doit se tenir en 1977 commence à s’imposer.
Le 7 avril 1974, après la disparition du président Georges Pompidou, un consensus se fait autour de René Dumont afin qu’il soit le candidat  écologiste.
Il devient alors le premier écologiste à briguer la magistrature suprême, lors de l’élection qui se tient en mai 74.
Le résultat du scrutin sur la France est modeste (1,32 % des votes), mais il s’agit alors surtout d’utiliser les médias et particulièrement la télévision pour faire connaître la pensée écologiste en politique. Un certain Brice Lalonde est alors son directeur de campagne électorale
Cette écologie à la française, dont René Dumont est l’un des premiers porte-paroles, est pacifiste, contre un capitalisme agressif et débridé  (l’agronome n’a rien contre la propriété foncière si elle n’est pas à l’origine d’un partage trop inégal des fruits du travail et si les droits des agriculteurs sont respectés), pour la solidarité entre les peuples et elle prend en compte le monde en voie de développement.
Certains voient en René Dumont le père spirituel de l’écologie française, et des Verts en particulier. Les Verts dont il soutint régulièrement les candidats à la présidentielle et qui après sa mort créeront une association en vue d’une fondation portant son nom, qui l’ont toujours considéré comme l’un des leurs.

René Dumont considérait que le développement n’était pas une question d’argent, de système social ou de techniques, mais plutôt la résultante d’un équilibre entre les trois.
Il accordait une place première à l’intelligence des paysans et à leur capacité d’apprentissage et d’innovation. Il soutenait que les relations entre les hommes et leurs champs reposaient essentiellement sur les relations existantes entre les hommes eux-mêmes, les relations sociales constituant les bases sur lesquelles reposent une agriculture et un développement industriel de qualité. Enfin, il considérait que les piliers soutenant de bonnes relations sociales entre les hommes reposaient sur de bonnes relations entre les hommes et les femmes. Il affirmait ainsi sa croyance en l’importance de l’émancipation de la femme dans le cadre du contrôle démographique (droit à l’avortement).

René Dumont a surtout été un grand visionnaire: il a  été un des premiers à expliquer les conséquences de ce qui ne s’appelait pas encore  la mondialisation : explosion démographique productivisme à tout va, gaspillage, pollution. Il a aussi été, à l’époque de Levi-Strauss et son «  tristes tropiques », un observateur critique de l’inégalité croissante hémisphère nord/hémisphère sud.

Visionnaire, il  s’inquiétait déjà  du réchauffement climatique alors que le monde fêtait la fin de la guerre froide. Nous sommes en 1991.
Farouche anti-voiture bien avant Anne Hidalgo, il estimait avec la mesure qui le caractérise que « la voiture, ça pu, ça pollue, ça rend con »
Enfin, Dumont, c’était aussi un humaniste convaincu et convaincant « à gauche de la gauche » comme avait un jour titré Libération et un des premiers altermondialistes. (il fonde en 1998 le groupe ATTAC, fer de lance de l’anti-mondialisation française).

Lors de son enterrement le 19 juin 2001, René Dumont voulu que la cérémonie s’achève sur « le déserteur » de Boris Vian. Sublime révérence de l’humaniste pacifiste qui aura été de  tous les combats.

 

 

Sources et crédits: INA, Le Monde, Libération, Wikipedia,

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Journaliste, peintre et musicien, Kira Moon est un homme curieux de toutes choses. Un penchant pour la découverte qui l'a emmené à travailler à Los Angeles et Londres. Revenu en France, l'oiseau à plumes bien trempées s'est posé sur la branche Zeweed en 2018. Il en est aujourd'hui le rédacteur en chef.

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