Le Mexique fête cette année les 100 ans de la prohibition. Une date importante aux yeux des militants procannabis qui ont décidé d’investir un monument célèbre de la capitale afin de se faire entendre par les politiques.
Entre hésitation législative et abus policiers, les militants sont à bout
Il existe un dicton mexicain qui dit « Aucun hay mal que dure cien años » ce qui signifie « rien de mauvais ne dure pendant cent ans ». Voilà le mot d’ordre des stoners mexicains qui considèrent que la prohibition du cannabis, instaurée le 15 mars 1920, a assez duré.
Afin de se faire entendre par les élus, des militants ont décidé de marquer les esprits. Le 23 janvier dernier, ils ont attendu le 4h20 (PM) pour se réunir devant l’Ángel de Independencia, l’un des monuments les plus visibles et connus de Mexico. Le symbole est d’autant plus fort, car ce monument a été construit pour célébrer les 100 ans de l’indépendance du Mexique.
Non seulement les fumeurs engagés s’y sont réunis, mais ont surtout planté pas moins de seize pieds de cannabis à la base de la statue ! Parmi les chefs de file, on retrouve une militante bien connue dans le pays, Jade Luna Villavicencio qui se dit persuadée que la fin de la prohibition approche. « J’ai l’espoir – comme beaucoup d’entre nous – qu’en raison de toute la force qu’on met dans ce combat, nous finirons par parvenir à un accord », a déclaré l’activiste.
Si elle se montre aussi confiante, c’est parce que bien qu’encore illégal, la Cour suprême du Mexique avait, en 2018, jugé inconstitutionnelle l’interdiction de la consommation et de la culture du cannabis. Cette décision s’apparentait à une légalisation de fait, bien que le gouvernement n’ait pas eu le temps de légiférer sur la question.
Depuis, une proposition de loi a été déposée le 1er octobre dernier afin d’organiser la nouvelle législation ainsi que le cadre de distribution.
Une proposition qui fait débat, car dans le dernier texte publié par le Sénat la semaine dernière, les citoyens seraient obligés d’avoir une licence pour cultiver un maximum de six plants. De plus, au- delà de 28 grammes les fumeurs s’exposeront à des poursuites pénales. Les militants considèrent d’ailleurs que le projet de loi privilégierait les entreprises étrangères au lieu d’aider au développement de l’économie souterraine du cannabis mexicain. Enfin, ce texte ne mentionne pas les droits constitutionnels reconnus par la Cour Suprême en 2018.
Les militants reçus par la maire
Pari réussi pour les stoners car certains d’entre eux ont été reçus quelques dizaines de minutes après leur action par Claudia Sheinbaum, maire de Mexico et membre du Parti de la Révolution démocratique (centre gauche).
Parmi les sujets abordés, les techniques des policiers locaux qui ne se privent pas d’extorquer tout citoyen en possession de cannabis, peu importe la quantité. D’après les victimes, la police serait habituée à faire semblant de trouver plus d’herbe que les cinq grammes autorisés afin de forcer la personne contrôlée à payer un pot-de-vin en plus de lui saisir tout ce qu’elle possède en lien avec le cannabis . Pier Giuseppe Coppe Hernández, militant présent lors de la réunion avec la maire explique à nos confrères de High Times avoir été « extorqué plus que jamais au cours des six derniers mois ». Il accuse la police de lui avoir pris « mon argent, mon portefeuille, ma marijuana, mes pipes. Cette situation ne peut pas durer ».
De son côté, Sheinbaum a affirmé avoir déjà demandé à ses services de police d’arrêter de prioriser les contrôles des fumeurs. Pour ce qui est des abus, elle est restée plus évasive. Pepe Rivera, fondateur de l’Institut mexicain du cannabis et également présent à la réunion explique : « c’était troublant. Quand nous lui avons dit ce qui se passait avec les consommateurs de cannabis et la police, elle nous a dit que cela ne se passait tout simplement pas ».
À la fin de la réunion, les militants ont tenu à offrir à la maire un gros plant de cannabis afin de l’inciter à mettre un terme aux extorsions policières envers les fumeurs mexicains. En tout cas ils ne comptent pas s’arrêter là. D’autres actions sont d’ailleurs prévues, notamment devant le Sénat.
Vincent