Alors que le résultat des législatives redessine le paysage politique français en faveur du Front Populaire, la question de la légalisation du cannabis, chère aux partis composant la nouvelle majorité à l’Assemblée nationale, a de grandes chances de trouver une issue favorable.
Au surlendemain des résultats des élections législatives, plusieurs tenors de la gauche plurielle ont fait savoir leur volonté de voir nommer à Matignon un membre du Front Populaire, notamment par la voix de Mathilde Panot (LFI) qui « (exige) qu’Emmanuel Macron respecte le vote populaire en choisissant de nommer un Premier ministre ou une Première ministre qui serait issu du Nouveau Front populaire » ou encore celle de Manuel Bompard (LFI ) qui estime qu’« aujourd’hui, nous nous préparons à gouverner. Nous nous préparons à appliquer le programme qui est le nôtre ».
Un optimisme justement tempéré par l’élue écologiste Marine Tondelier « On ne peut pas faire croire aux gens que dans la situation politique inédite qui est la nôtre, d’un claquement de doigts, on va sortir avec un Premier ministre, un gouvernement, tous les postes à l’Assemblée répartis par magie. Ça ne marche pas comme ça »
Soigner sa gauche
En effet, s’il est peu probable que le président remercie Gabriel Attal pour nommer un premier ministre qui soit issue de la nouvelle majorité relative, l’actuel ou futur locataire de Matignon devra refondre le gouvernement pour y inclure des ministres frontpopulairiens. Au marocain de la santé et au travail, exit Catherine Vautrin, farouche opposante au cannabis récréatif et thérapeutique. Le nom de Dominique Voynet circule déjà, une bonne nouvelle pour les partisans d’une fin de prohibition. Une inclinaison au progressisme qui se retrouve dans la majeure partie des membres de la nouvelle majorité.
Après avoir fait les yeux doux à l’électorat de droite, Emmanuel Macron va donc devoir soigner sa gauche et revoir (encore) sa position sur le statut légal de l’herbe : en 2017 il estimait que « La légalisation a une forme d’efficacité ».
Au delà des arguments de santé publique, une de ces formes d’efficacité est de remettre de l’argent dans les caisses de l’Etat alors que le budget de a explosé (5, 1% du PIB en lieu des 4,4% prévus par Bruno Le Maire) et que Bercy cherche plus de 10 milliards pour respecter ses engagement vis-à-vis de Bruxelles. Légaliser le cannabis, récréatif comme thérapeutique, pourrait rapporter entre 10 et 30 milliards à l’Etat, avec à la clef la création de 200.000 emplois.
Evidence économique
Une économie que l’on ne saurait refuser en temps d’austérité et d’incertitude. Jouer au gaulois réfractaire nous place à contre-courant de la marche empruntée par nos voisins allemands et Luxembourgeois qui ont légalisé, tandis que la République tchèque et la Slovénie en prennent le chemin, que la Belgique annonce aussi sa volonté de changer de politique. Cette même politique répressive qui continue d’être appliquée en France à grand coups d’épée dans l’eau et d’opérations « Place nette XXL ».
Pourtant, en 2020, plusieurs députés de la majorité dont Caroline Janvier et Jean-Baptiste Moreau avaient laissé entendre que pour les élections présidentielles de 2022, qu’Emmanuel Macron serait le champion d’un changement de législation au profit d’une légalisation encadrée, à l’instar de celle pratiquée au Canada. Modèle vertueux récemment loué sur la chaîne du service publique France 2, dans le documentaire de Mathieu Kassovitz « Cannabis ».
Les mêmes causes produisant les mêmes résultats, s’entêter a suivre une politique de répression vieille d’un demi-siècle relève de l’obscurantisme. Reste à espérer que ce nouveau gouvernement sortira la France de l’ornière pour lui redonner son titre de pays des lumières.