Le candidat des écologistes à la présidentielle décline son programme. Verdict : pas de surprise, peu d’ambition. Et zéro envie.
Yannick Jadot ne perd pas de temps. Sitôt désigné candidat à la présidentielle par la primaire des écologistes, le député européen défouraille son programme. Dans un long entretien accordé au Journal du dimanche, l’ancien directeur des campagnes de Greenpeace-France multiplie les propositions dans le domaine du social, des institutions, de l’économie. Il y glisse même quelques idées écologistes. Ma rubrique étant teintée de vert, je me consacre à ce chapitre.
D’entrée de jeu, le Picard promet d’éradiquer l’élevage industriel. Bonne idée, a priori. A ceci près que remettre dehors veaux, vaches, cochons nécessite de trouver des terres supplémentaires. Et pas qu’un peu ! La réglementation sur le « plein air » impose 4 m2 par poule. Les paysans français élèvent chaque année 40 millions de poules. Les faire vivre outdoor nécessite de trouver 16.000 hectares de terrains. Pas gagné. D’autant qu’il faudra aussi trouver des terrains supplémentaires pour les canards, les oies, les bovins, les caprins, les cochons, les dindes, les cailles, les lapins. Pas gagné en période de déprise agricole. Mais là, pas de proposition concrète du candidat vert.
Pour qui l’argent public ?
Les lobbys ? Yannick Jadot veut les « extirper » de l’économie française. Certes, mais nul ne sait comment. Alors bien sûr, « chaque euro d’argent public sera conditionné à la protection de l’environnement ». Mais entre un fabricant de batterie de véhicule électrique et un importateur de panneaux solaires chinois, qui le protège le mieux ?
A propos de sous, l’ancien porte-parole de l’Alliance pour la planète promet un programme d’investissement public de 50 milliards d’euros par an, dont la moitié sera consacrée « à la reconstruction ». On n’en sait pas beaucoup plus. Ce que nous dit, en revanche, l’institut pour l’économie du carbone (I4CE), c’est que pour atteindre les objectifs de décarbonation que nous nous sommes fixés, nous devons investir de 65 à 74 milliards d’euros par an. Faudra trouver un petit peu plus de sous, monsieur Yannick.
Un ISF climatique
Le tombeur de Sandrine Rousseau veut avancer de 10 ans (2030 donc) l’interdiction de vente de voitures à moteur thermique. Génial ! Surtout si les industriels tricolores produisent des batteries « 100% recyclables ». Sauf que, sur la trentaine de gigafactories en train de sortir de terre en Europe, seules deux sont situées dans l’Hexagone. Ce ne sera pas facile de convaincre leurs concurrentes de passer à l’économie circulaire. Mais on peut essayer.
La taxe carbone est appelée à repartir à la hausse, semble-t-il. Sans qu’on sache très bien comment le président Jadot évitera de rallumer le mouvement des Gilets jaunes. Seule promesse : « nous ne laisserons personne au bord de la route ». Quoi qu’il en coûte ? Il faudra alors que l’impôt sur la fortune climatique (c’est prévu !) taxe très lourdement les riches émetteurs de gaz à effet de serre pour que la mesure soit socialement indolore. Rappelons que pour être efficace, la taxe carbone devrait atteindre 250 € la tonne de CO2 émise. Soit 5 fois le niveau actuel.
Gaspillages énergétiques ?
A propos de carbone, le candidat écologiste propose de rendre gratuits les premiers kWh d’électricité et les premiers m3 de gaz naturel. Ce qui n’est pas une mesure favorable aux économies d’énergie, ni aux finances d’EDF et d’Engie dont l’Etat est un gros actionnaire. Gaspillage d’énergie et d’argent public ?
Refrain incontournable d’un écolo : la sortie du nucléaire. Le Jadot 2022 la promet pour 2042. Soit. Mais que faire des millions de tonnes de déchets nucléaires que génèrera le démantèlement de 58, réacteurs si l’on ne peut les mettre quelque part ? Car Yannick Jadot le dit depuis longtemps : « l’enfouissement des déchets nucléaires : ni à Bure ni ailleurs ».
On ne va pas se mentir comme dirait Nicolas Hulot. Le programme environnement de Jadot est truffé de promesses intenables. Comme le sera celui de tous les programmes des candidats déclarés ou à venir.
Ce qui manque, c’est un souffle, un récit, une ambition. Le géant vert ne donne pas (encore ?) l’impression qu’il est celui qui fera entrer la France dans le siècle de l’écologie sociale. Il a encore six mois pour me faire mentir.