Macron l’avait promis pendant la campagne de 2017, voilà que ça devient réalité. L’amende à 200 euros pour les dangereux fumeurs de cannabis va être testée dans trois villes françaises.
La dépénalisation selon Macron
Alors tout nouveau, tout fringuant sur l’échiquier politique, Macron a joué la carte cool et jeune pour engranger les suffrages et remporter l’élection. Bien que le président français se soit autoproclamé champion du progressisme, ses positions sur le cannabis n’ont rien à envier à celles de l’extrême droite à savoir, répression à tout prix.
Cependant, le candidat Macron a eu une idée révolutionnaire : et si on collait des amendes aux fumeurs au lieu de les arrêter ?
Pendant sa campagne, le futur président a beaucoup été critiqué sur le flou de sa notion de dépénalisation qui n’était qu’une modification de la loi pour passer à la contravention, jugée « plus dissuasive et efficace ».
Il faut savoir que jusqu’à présent, un fumeur risquait un an de prison et 3750 euros d’amende. Cette sanction totalement aberrante n’était en réalité presque jamais appliquée.
Beaucoup ont certainement fait un petit tour au commissariat après s’être fait pincer, mais au vu de la surpopulation carcérale, les charges étaient souvent abandonnées après destruction du produit.
Avec ces éléments en tête une chose est parfaitement claire, désormais la sanction sera à chaque fois appliquée, car il suffira aux policiers de donner une contravention. Un gain de temps bienvenu pour les forces de l’ordre, mais une répression qui s’accentue pour des gens qui souhaitent simplement fumer de l’herbe sans déranger les autres.
Alors que cette contravention a obtenu le feu vers de l’Assemblée nationale le 23 novembre dernier, elle sera testée dans les prochaines semaines dans trois villes françaises : Rennes, Reims et Créteil.
Un dispositif hypocrite, absurde et inutile
Concrètement, cette loi ne cherche qu’une chose : soulager les forces de police et faire rentrer un peu d’argent. On parle d’une économie de 226 à 380 millions d’euros d’économie sur les 481 millions que représente la répression.
Elle fait également office d’enfumage pour la frange la plus conservatrice du pays qui salue cette mesure sans comprendre que cette nouvelle législation va uniquement déplacer les fumeurs. En effet, pour ne pas risquer d’amende il existe une combine très simple, ne pas fumer dehors.
L’annonce de l’expérimentation a été faite par Philippe Astruc qui a affirmé à 20 minutes, avec une immense fierté, que « cet outil va désormais permettre de s’attaquer à la demande afin de responsabiliser les usagers et de les mettre face à leurs responsabilités. Car ce sont les clients qui font prospérer ces commerces à caractère mafieux ».
Des propos qui ont vite fait d’assimiler les horribles fumeurs aux pires organisations criminelles. On a évité de peu les accusations de financement de terrorisme.
Cette déclaration démontre toute l’hypocrisie du gouvernement et de ses exécutants. En effet, il serait intéressant d’expliquer à Monsieur Astruc que les fumeurs seraient ravis de participer à l’économie, d’aider à financer la sécu et ne pas risquer de se faire agresser à la sortie d’un four dans le 93. Seulement, tant que l’État restera friand des arguments fallacieux contre la légalisation et se complaira dans la lâcheté politique, c’est bien lui qui se fait le complice objectif de ces « commerces à caractère mafieux ».
On oublie également que bien que ces commerces rapportent gros, ils comportent de gros risques. Il n’y a aucun doute sur le fait qu’une bonne partie des dealers ne serait pas opposée à gagner moins si elle ne risque plus de sanctions tout en cotisant pour son avenir au sein de structures contrôlées par l’État.
En Marche : le progressisme en demi-teinte
Il est vrai qu’aujourd’hui le progressisme met plus l’accent sur des thématiques sociales comme l’intégration de minorités ou l’égalisation des droits. Cependant, le monde entier commence à revoir sa législation sur le cannabis. Quoi de plus conservateur que d’appliquer la même recette inefficace après des dizaines d’années ?
Depuis son élection, le président français fait régulièrement la leçon à nos voisins européens sur leurs systèmes de valeurs. Cependant rien n’est jamais tout blanc ou tout noir. L’Autriche qui est un pays à majorité conservatrice dispose d’une législation hautement permissive sur le cannabis.
En effet, la loi leur permettait depuis 1971 de posséder jusqu’à 10 grammes de weed ! Une tolérance déjà énorme jusqu’à la fin de la notion de petite et grande quantité en 2008. Désormais, on peut se balader avec 100 grammes dans le sac sans aucun risque, hormis s’il y a des preuves de vente.
Encore plus conservateur : la Pologne. Alors non, la Pologne n’est pas aussi tolérante en matière de weed que l’Autriche. La consommation de drogue n’est pas une infraction, mais la possession peut faire passer trois ans en prison.
D’ailleurs il n’existe là-bas aucune différence entre héroïne et cannabis, les deux sont logés à la même enseigne.
Cependant, le CBD est tout à fait autorisé dans le pays. En comparaison, l’apparition de magasins de CBD en France a fait l’objet d’une polémique.
La ministre de la Santé s’est immédiatement saisie du sujet pour combler le vide juridique autorisant ces magasins qui ont rapidement été perquisitionnés et fermés pour la plupart.
Une réaction totalement disproportionnée et qui, à la lumière des législations voisines, a ridiculisé notre pays encore une fois.
Pour le moment, il y a très peu d’espoir de voir les choses évoluer en France. Beaucoup va dépendre des besoins électoraux de Macron en 2022. Aura-t-il besoin de la gauche ou de la droite pour gagner ? Maintenant que de grands sujets de société ont été traités (mariage pour tous, PMA) est-ce le prochain sera la fin de la prohibition ?
Benjamin Monnier.