Aldous Huxley: un prophète.

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En 1932, alors que le monde ne connaît pas encore les affres du totalitarisme, Aldous Huxley imagine une société des plus flippantes. Ultra-hiérarchisée et liberticide, cette pire des existences possibles, où une race supérieure génétiquement programmée règne sur des castes abruties de propagande, annonçait l’arrivée des régimes nazi et communiste. Près d’un siècle plus tard, l’œuvre de l’auteur du “meilleur des mondes” et le spectre de la surorganisation résonnent plus que jamais. Retour sur l’homme qui avait vu le futur.

Humaniste, pacifiste, révolté, cynique ou professeur, Aldous Huxley aura vécu autant d’existences qu’il aura échafaudé d’avenirs cauchemardesques.
Une inclinaison à anticiper le pire qui s’explique, selon les confessions de l’écrivain, par une peur du lendemain connue très tôt : à neuf ans, le jeune Aldous tombe gravement malade et manque de perdre la vue.
Alors qu’il se bat pour sa santé, son père, écrivain, lui transmet son amour de la chose littéraire. Sous l’influence de son grand-père, dont il est proche et qui n’est rien d’autre que le plus précieux collaborateur de Darwin, dans une littérale obscurité causée par la maladie, Huxley élabore déjà des mondes et des systèmes.
Une santé défaillante qui aura pour mérite de ne pas le voir envoyé sur le front de la Grande Guerre.
Plutôt que dans les tranchées, c’est entre les pupitres et rangs d’élève que l’écrivain fait ses classes, observant avec autant de recul que d’intérêt la folie du conflit 14-18.
Pendant trois ans, Huxley dispense ses cours au sein du très prestigieux collège d’Eton. Il y enseigne un français dont il parle couramment, avec comme élève un certain Eric Blair, qui se fera plus tard connaître sous le nom de Georges Orwell.
La pomme du disciple ne tombe jamais loin de l’arbre du maître, 1984 étant considéré comme un très honorable pendant du “Brave new world” d’Huxley.
Et pourtant, il est dit du professeur Huxley qu’il est « incompétent, incapable de discipline, mais impressionne par son langage »*
C’est après cette collégiale expérience et un bref passage dans les bureaux du ministère de l’Armée de l’air de Sa Majesté que le futur prix Nobel de littérature se lancera dans l’écriture.
“Contrepoint” sera son premier succès, “Le meilleur des mondes” sa consécration.
Après avoir rencontré public et critiques en Grande-Bretagne, Huxley, à l’étroit au Royaume-Uni,  s’envolera en 1939 avec sa femme vers le pays de tous les possibles, les États-Unis.
À Hollywood plus précisément, dernière limite physique du monde occidental, étendard de la propagande capitaliste.

Hollywood et mescaline: au far-west de la conscience.
C’est à Los Angeles qu’il fera la rencontre du psychiatre Humphrey Osmond, qui l’introduira aux charmes psychédéliques de la mescaline, un puissant hallucinogène tiré du Peyotl.
Une expérience qui marquera profondément Huxley, et qui le poussera à écrire ” Les portes de la perception”, un ouvrage culte et de référence, de Timothy Leary à Jim Morrison en passant par Steve Jobs.
Ces voyages en « terra incognita » comme il l’aime à l’appeler, estimant qu’explorer les méandres du subconscient de l’homme est la dernière grande aventure,  il en fera plusieurs, tous très documentés et conduits dans un esprit le plus rigoureux… possible.
C’est à cette époque qu’il devient végétarien et se met au yoga, un penchant pour une vie saine qui fait de lui un des précurseurs du mouvement  New-Age.
Zeweed a retrouvé pour vous une précieuse interview accordée à la télévision canadienne, dans laquelle le romancier et essayiste développe les grands axes de son œuvre et détaille ses expériences avec la mescaline.

 

Le grand voyage.
Dans ces derniers moments, privé de parole alors qu’un cancer de la gorge l’emporte, il demande par écrit à sa femme de lui administrer une dose de LSD, un dernier trip  qui le plongera dans un état de méditation et de béatitude extatique, décrite par les personnes présentes comme un état de « complet amour ».
Après une seconde dose,  il s’éteint le 22 novembre 1963 dans les bras de son épouse, rentrant pour toujours dans la postérité et cette terra incognita qu’il aimait tant à explorer.

*George Orwell : une vieBernard Crick, Balland, 1982.
**« Lettre de Laura Huxley à Julian et Juliette Huxley »  sur huffingtonpost.fr(consulté le 18 février 2015)

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Journaliste, peintre et musicien, Kira Moon est un homme curieux de toutes choses. Un penchant pour la découverte qui l'a emmené à travailler à Los Angeles et Londres. Revenu en France, l'oiseau à plumes bien trempées s'est posé sur la branche Zeweed en 2018. Il en est aujourd'hui le rédacteur en chef.

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